Navigation – Plan du site

AccueilNuméros33Covid-19 et passage éclair au dis...

Covid-19 et passage éclair au distanciel pour les enseignants de langues vivantes du secondaire : une expérience renvoyant à l’irréductible présence en classe de langue

Covid-19 and the rapid transition to distance learning for foreign language teachers in secondary schools: an experience relating to the crucial importance of presence in the language classroom
Emmanuelle Croze

Résumés

La période de confinement liée à la pandémie de la Covid-19 de l’année 2020 a conduit les enseignants de langues vivantes du secondaire à passer dans l’urgence du présentiel au distanciel. Cet événement inédit a engagé ces derniers à expérimenter sans préparation une situation de perte des repères qui définissent l’enseignement-apprentissage des langues vivantes en collège et lycée. C’est ce que montrent les résultats de notre enquête conduite durant la période de confinement et cela plus particulièrement à travers l’expression d’une perte de contact avec les élèves telle qu’elle est vécue en classe de langue. La distance dans cette situation bien particulière a fait émerger le manque de présence. Mais à quoi renvoie cette présence pour les 115 enseignants de langues vivantes qui ont répondu à notre enquête ? Est-elle spécifique au contexte de la classe de langue ou peut-elle se rattacher au concept de présence tel qu’il est défini dans les recherches sur les formations à distance médiées par les technologies ? C’est ce que nous nous proposons d’interroger dans cette étude.

Haut de page

Texte intégral

Introduction

  • 1 Cf. circulaire du 13 mars 2020 laquelle invoque, pour assurer cette continuité, l’utilisation des p (...)

1Notre étude se rattache à une situation singulière, la poursuite de l’enseignement scolaire à distance renvoyant à l’une des mesures prises par le gouvernement pour endiguer la propagation de la pandémie de la Covid-19. À partir du 16 mars 2020, l’utilisation des TIC par les enseignants de langues vivantes (désormais LV) ne relevait ainsi plus d’une injonction théorique (Guichon, 2012 ; Nissen, 2019; Soubrié, 2016; Vallaud-Belkacem, 2017), mais était imposée comme seule voie possible pour assurer une continuité pédagogique1. Compte tenu de cette situation inédite, notre enquête se voulait exploratoire, visant l’obtention de données relatives à la façon dont les enseignants de langues vivantes du secondaire faisaient l’expérience d’un enseignement exclusivement à distance imposé dans l’urgence. Les résultats ont révélé que l’une des principales difficultés des enseignants de langues vivantes de collège et lycée ressortissait à l’absence de face à face en présentiel. On pourrait dire que ces résultats font écho à ce qu’avait déclaré Jacquinot-Delaunay (2001, p. 188) il y a une vingtaine d’années alors que les TIC commençaient à prendre leur essor en France, concernant le fort attachement dans l’enseignement à « cette expérience de présence réduite à la présence "physique" et donc à cette idée que dès qu’il n’y a plus de présence physique, il n’y a plus de communication authentique ». Toutefois, l’auteure invitait aussi à questionner le sens de présence, considérant que la présence physique renvoyait à l’une des dimensions possibles de la présence (Jacquinot-Delaunay, 2000). Notre étude s’inscrit dans le prolongement de cette réflexion visant à envisager ce que sous-tend la présence en classe de langue, considérée comme indispensable par plus de la moitié des 115 enseignants de LV de collège et lycée qui ont répondu au questionnaire diffusé. L’analyse des déclarations des répondants sur le manque de présence vécu dans cette expérience particulière entend ainsi mettre au jour ce qui se dit, en creux, sur la présence en présentiel.

2Pour ce faire nous nous appuierons sur des apports théoriques se rapportant à la question de la présence dans l’enseignement-apprentissage en distanciel et en présentiel. Nous présenterons les principales réflexions scientifiques qui, de Jacquinot-Delaunay (1993 ; 2001) à Jézégou (2020 ; 2007, 2010, 2019), ont permis de questionner l’idée de présence dans les formations à distance médiatisées par le numérique. Ensuite nous proposerons des apports théoriques renvoyant notamment aux interactions ainsi qu’à la relation enseignant-élèves en contexte scolaire permettant de mettre en lumière des éléments susceptibles de définir l’idée de présence en classe de langue.

Cadre de référence : de la présence pensée dans la distance à la présence en face à face

3La distance comme la présence en contexte de formation sont avant tout, on le sait, relatives à l’expérience vécue de chaque individu. En effet, « on peut être présent en face à face et complètement absent » comme l’indiquait Jacquinot-Delaunay (2001, p. 188) et ressentir de la proximité dans une formation à distance (Jézégou, 2019). Plusieurs types de distances et de présences ont d’ailleurs été mises au jour dans les recherches portant sur les formations en ligne et à distance (Bourdet, 2010 ; Jacquinot, 1993 ; Jézégou, 2019 ; Kiyitsioglou-Vlachou et Moussouri, 2010 ; Peraya, 2014). L’objectif de notre étude étant d’examiner ce à quoi renvoie la présence, présence « manquante » pour les enseignants de LV du secondaire interrogés, nous reprendrons les principales réflexions théoriques sur la présence en contexte de formation médiatisée à distance, ensuite nous présenterons des éléments théoriques permettant de définir ce qui est susceptible de générer de la présence en présentiel et notamment en classe de langue.

Le concept de présence dans la formation à distance

4Dans le champ de la didactique, le concept de présence est essentiellement corrélé au développement de la formation à distance (FAD) médiée par les technologies, la question posée étant dans ces contextes de trouver comment « créer de la présence à distance » (Jézégou, 2010). La présence est ainsi avant tout définie à partir d’un questionnement sur la distance en contexte de FAD. Dès l’émergence des premiers dispositifs de formation à distance médiés par les technologies, il s’est agi en effet de considérer la notion de « distance en formation » (Linard, 1995) pour aller vers plus de présence et ce, non pas seulement en termes de temps et de lieu, mais aussi et surtout de relation sociale entre les acteurs de la formation. Comme l’a précisé Paquelin (2011, p. 566), « [l]’enjeu de cette présence relève davantage de mises en lien, de relations entre différents acteurs (apprenants, formateurs, tuteurs) ».

5Deux principales orientations de recherche se rattachent à cette conception de la distance renvoyant à la relation entre les sujets et permettant de penser la présence dans la distance selon Jézégou (2010, p. 258). La première envisage le concept de présence en lien avec « les interactions sociales entre les apprenants, mais aussi entre le formateur et les apprenants […] véhiculées par la communication verbale en ligne ». Cet axe de recherche apparait dès les années 2000 dans les travaux de chercheurs anglophones nord-américains en sciences de l’éducation (Garrison et Anderson, 2003 ; Garrison, Anderson et Archer, 1999) et plus récemment en France dans ceux de Jézégou (2020 ; 2008, 2010, 2019). Plus spécifiquement pour Jézégou (2019, p. 194), la présence dans une formation à distance est définie comme :

une dynamique relationnelle créée et vécue par les sujets psychologiques et sociaux que sont les apprenants et les formateurs placés dans une situation de séparation physique et interagissant de façon synchrone et/ou asynchrone au sein d’un espace numérique de communication via des artefacts spécifiques.

6Ce sont ainsi les interactions verbales (écrites et orales) entre les acteurs de la formation (apprenants et formateurs), et cela « sans que le langage du corps soit [nécessairement] perceptible par les interlocuteurs distants » (Jézégou, 2010, p. 258), qui sont susceptibles de créer de la présence. Jézégou (2020, p. 62) précise également que cette présence résulte « d’une dynamique relationnelle médiatisée entre les apprenants et entre les apprenants et l’enseignant » implique deux conditions. L’une se rattache à l’outil utilisé pour communiquer, l’autre à l’engagement des acteurs dans la situation de communication. La création de présence va dépendre de l’affordance de l’artefact numérique utilisé, l’affordance de l’outil d’une part, « renvoyant aux propriétés des artefacts telles que pensées et élaborées par leurs concepteurs » (Androwkha et Jézégou, 2020, p. 62), l’affordance perçue par les utilisateurs, d’autre part. Il s’agit pour les utilisateurs de percevoir la facilité d’utilisation de l’outil ainsi que son utilité. Cette perception conditionnera alors l’attitude de l’utilisateur à l’égard de l’artefact et « influ[era] sur son intention de l’utiliser ou pas » (Androwkha et Jézégou, 2020, p. 62). Ainsi si nombre de moyens technologiques exploités dans la FAD sont pensés pour permettre des interactions (service de visioconférence, chat, forum …) et générer de la présence, le sentiment de présence reste néanmoins subordonné à la perception et à l’utilisation de ces possibilités par les utilisateurs. La seconde condition pour créer de la présence est liée à « l’agentivité individuelle et collective des interlocuteurs (apprenants et enseignant/formateur) » (Androwkha et Jézégou, 2020, p. 61). Cela induit que les acteurs soient engagés intentionnellement dans une action donnée, qu’il s’agisse des apprenants ou de l’enseignant, lequel « doit [notamment] faire preuve d’agentivité pour soutenir les efforts des apprenants dans ce sens » (Androwkha et Jézégou, 2020, p. 63). Androwkha et Jézégou (2020, p. 61) précisent cependant que si la création de présence implique nécessairement ces deux éléments, elle ne peut avoir lieu qu’à la condition que « les apprenants (et l’enseignant) soient suffisamment motivés pour interagir entre eux et qu’ils développent des stratégies efficaces pour qu’une dynamique relationnelle émerge et se développe ». Ces derniers points nous semblent particulièrement intéressants à relever dans une situation où les apprenants sont captifs comme dans le cas de notre étude. En effet, la question de l’agentivité comme celle de la motivation se posent nécessairement de façon différente pour des apprenants en collège et lycée et pour des étudiants ou adultes en formation, lesquels sont majoritairement concernés dans les études portant sur la question de la distance/présence en contexte médiatisé à distance.

7La seconde orientation de recherche fondée sur l’idée que la distance renvoie à une distance relationnelle se rattache notamment aux premières réflexions de Weissberg (2001, p. 31) sur la téléprésence, envisagée comme « un autre milieu perceptif dans lequel se concrétisent notamment des mouvements relationnels entre objets et sujets humains, particulièrement sensibles dans le travail coopératif à distance ». Pour Weissberg (2001, p. 31), cet espace cherche à se rapprocher de ce qui se joue dans la communication en face à face, prenant ainsi en compte une présence fondée sur « le modèle principal de la relation humaine », le « partage commun de ‘l’ici et maintenant" ». Cette relation se caractérise selon Weissberg (2001, p. 31) par sa dimension « "haptique" (du grec haptein, toucher) » impliquant non seulement des échanges verbaux et non verbaux, mais aussi des gestes et « contacts corporels concrets ou potentiels ».

8Dans cette continuité, un certain nombre de chercheurs en didactique des langues (Develotte, 2011 ; Develotte, Kern et Lamy, 2011 ; Guichon et Tellier, 2017) se sont intéressés à la conversation en ligne en visioconférence permettant ainsi de mettre en lumière des traits communs et différents dans la conversation en face à face en présentiel et en ligne. Des éléments tels que ceux renvoyant à la gestualité qui accompagne la parole notamment (geste relié au propos, mimiques, ton, etc.), mais aussi par exemple aux « profils interactifs » en tant que « comportements relationnels interindividuels » des interactants (Cosnier et Develotte, 2011, p. 42) apparaissent ainsi dans les deux situations en présentiel et distanciel. D’autres éléments montrent cependant que l’échange en visioconférence demeure spécifique du fait de la médiation technologique. De celle-ci découle en effet une autre manière de communiquer avec une organisation différente des tours de parole (Traverso, 2011) ainsi que la possibilité de converser simultanément à l’oral et à l’écrit (avec le clavardage) (Flewitt et Lamy, 2011) et, avec une focalisation sur les expressions du visage (Guichon, 2017), focalisation liée à la circonscription du visage dans l’espace de la fenêtre. Cette particularité de l’échange en visioconférence rejoint plus généralement l’hypothèse formulée par Guichon et Tellier (2017, p. 24) sur l’enseignement de l’oral en ligne :

Enseigner en ligne n’est pas une simple transposition de pratiques pédagogiques en présentiel, mais suppose que les enseignants comprennent et s’approprient les affordances du dispositif en ligne, sachent proposer et animer des tâches pédagogiques, soient en mesure de reconnaitre des patrons de communication, et négocient un rôle pédagogique particulier.

9En ce sens, la présence en ligne est une présence à « construire » (Guichon, 2017, p. 29) dans ces contextes d’enseignement-apprentissage à distance. Pour Jézégou (2019, p. 193) il s’agit bien de mettre au jour ce qui permet de créer de la présence en situation de « e-formation », présence qu’elle définit à la fois comme une présence « objective [qui] résulte notamment de certaines formes d’interactions sociales entre le formateur et les apprenants » et ressentie, renvoyant au « sentiment de présence "à distance" [comme] représentation fantasmée de la relation à autrui ». Weissberg (2001, p. 31) précise également que la téléprésence « invente un autre milieu perceptif » et cela sans qu’elle ne « restitue à l’identique les performances que nous accomplissons habituellement ».

10Les études sur les interactions en ligne permettent ainsi plutôt comme le précisent Cadet et Cicurel (2017, p. 248) de « montrer ce que l’on peut et sait faire dans un cadre autre que la classe, même si la référence implicite reste cette situation de face à face avec un enseignant ».

La présence en classe de langue

  • 2 Jacquinot-Delaunay (2000) donnait à ce propos l’exemple des cours magistraux qu’elle avait suivis a (...)

11Comme le précisait Jacquinot-Delaunay (2001, p. 183), pour qu’il y ait de la présence il faut de l’interaction, qu’elle soit « mentale »2, verbale ou gestuelle. En classe de langue, ce qui permet de générer le « sentiment de présence » (Jacquinot-Delaunay, 2001) se rattache comme en distanciel à une situation d’interaction entre l’enseignant et les apprenants et entre les apprenants.

12Toutefois, dans une situation de face à face, ce qui accentue le degré de présence relève d’abord de cette coprésence corporelle renvoyant à la « dimension haptique » (Weissberg, 2000, p. 31) de la relation. La communication en face à face se trouve enrichie par la présence des corps perceptibles dans leur totalité. Le sentiment de présence renvoie ainsi à cette perception totale de la parole telle que la définit Colletta (2004, p. 15) :

un comportement qui associe des sons articulés à des mouvements corporels, et lorsque vous percevez une conduite langagière, vous percevez celle-ci dans les différentes modalités sensorielles dont vous êtes équipés. Autrement dit, non seulement vous reconnaissez les mots prononcés, mais vous les entendez avec leur musique (ce qu’on appelle la prosodie), et vous percevez en même temps les gestes, les mimiques, les regards… l’ensemble des mouvements corporels produits par le locuteur.

13Dans une situation d’enseignement-apprentissage des LV, en regard de la spécificité de l’objet qui est à la fois une finalité et le moyen de communication (Borg, 2006 ; Mangenot, 2011), l’exploitation de cette multimodalité de la parole associée notamment au corps de l’enseignant en classe peut être envisagée comme essentielle et difficilement transférable en distanciel. Selon Tellier (2008, p. 40), « le corps de l’enseignant est un outil pédagogique tout comme l’est sa voix » et l’enseignant doit savoir « en jouer afin d’aider l’apprenant dans le processus d’apprentissage ». Les gestes, c’est-à-dire « les mouvements des mains et des bras, produits avec la parole de même que les mimiques faciales » (Tellier, 2008, p. 40) sont, pour Tellier, fondamentaux dans l’apprentissage d’une langue étrangère, car ils permettent l’accès au sens. Cette spécificité de la communication s’appuyant largement sur la multimodalité de la parole est également évoquée par Cicurel (2002, p. 154) pour laquelle la classe de langue est un lieu où les pratiques de l’enseignant se déploient, notamment à travers « les pratiques langagières didactiques » qui peuvent être « verbales, non verbales, mimogestuelles ».

14Cette multimodalité de la parole et notamment les gestes participent également de la construction d’un code commun renvoyant à l’ici et maintenant de la classe. Tellier (2008, p. 45) montre dans une étude que certains gestes visent par exemple à animer. lls comprennent « à la fois les gestes de gestion de classe (changement d’activité, démarrage et clôture d’activité, placement des apprenants/du matériel, punir/gronder/faire taire, donner des consignes) et de la gestion des interactions et de la participation (réguler les débits/le volume sonore, faire répéter, étayer, interroger, donner la parole) ».

15Pour Tellier (2008, p. 44), ces gestes reproduits régulièrement de même que ceux de l’apprenant participent de la construction d’une communication particulière fondée sur « un code gestuel commun partagé par les acteurs d’une même classe ». Ce partage commun fondé sur une entente réciproque des gestes susceptible de participer à cette idée de présence renvoie aussi à l’interaction généralement envisagée dans sa dimension collective en classe de langue.

16Pour Cicurel (2002, p. 148) la classe ne s’envisage pas seulement comme un « lieu de progression langagière », mais aussi et surtout « comme [un] lieu de parole et de socialisation » engageant l’enseignant et le groupe d’apprenants considéré comme « un groupe social ». L’interaction prend ainsi appui sur le collectif, qu’il s’agisse d’échanges entre enseignant et groupe d’apprenants permettant notamment un « échange co-construit au sein de la classe » (Cicurel, 2002, p. 149), ou entre apprenants. Le sentiment de présence en classe de langue pourrait ainsi être rattaché à la mise en œuvre dans l’espace de la classe de ces interactions collectives impliquant la parole « totale » (voir Colletta 2004, p. 15).

17À cela s’ajoute ce qui nous semble constituer l’un des traits définitoires les plus enclins à définir la communication en face à face : le caractère d’imprévisibilité inhérent à ce partage commun de « l’ici et maintenant » pour reprendre Weissberg (2001, p.31). Le cours en présentiel, bien que régulé par l’enseignant, progresse au fil des interactions qu’elles soient verbales ou non verbales et laisse de fait la possibilité à l’enseignant de répondre à l’imprévu et d’adapter son cours en fonction des demandes spontanées (implicites ou explicites) des apprenants. En classe, l’activité d’enseignement est ainsi soumise à l’influence de la situation d’enseignement-apprentissage toujours spécifique, en fonction des interactions qui s’y tiennent de sorte que « constamment, l’action planifiée du professeur rencontre des épisodes pouvant survenir dans le déroulement de l’interaction et la modifier » (Cicurel, 2002, p. 147). Linard (1994) et Cicurel (2002) parlent de cette capacité d’adaptation et d’improvisation propre à l’enseignant expert en contexte de classe. Pour Linard (1994, p. 52), elle relève d’une « stratégie experte » de l’enseignant et permet notamment « de passer à un autre niveau, de se dégager des contenus et de se concentrer sur les aspects imprévisibles de la tâche ». Pour Cicurel (2002, p. 153), ces pratiques expertes mises en œuvre « se situent entre la stratégie, connue d’avance, planifiée, et la tactique, qui surgit dans le vif de l’échange et pousse les protagonistes à improviser des solutions ». L’enseignant-expert sait donc s’adapter aux imprévus, il a, selon Cicurel (2002, p. 153), « recours à la ruse, à la nécessité d’inventer sur-le-champ, de faire avec, d’imaginer des solutions dans l’immédiateté de l’échange ». Bien sûr, ces pratiques d’adaptation – improvisation dépendent de l’enseignant dans son individualité, et de son expérience (Cicurel, 2002).

18Enfin, un dernier élément pourrait se rattacher au sentiment de présence. Il rejoint l’interaction enseignant-élèves en classe, mais en ce qu’elle est susceptible d’impliquer ou d’établir au niveau relationnel, un lien affectif. Selon Espinosa (2016, p. 143), cette relation enseignant-élève relèverait d’une rencontre humaine envisagée comme allant « au-delà, ou en plus, du savoir à transmettre, transmis, à acquérir ou acquis ». Pour Virat, elle renvoie à une tradition dans l’histoire de la pédagogie remontant notamment à Érasme (Virat, 2016, p. 406) :

Sans nul doute, ce sera grand profit si celui qui entreprend à instruire un enfant se vêt, par une bonne inclination de courage, d’une affection de père et de mère envers l’enfant. Car en toute besogne, l’amour ôte grande partie de la difficulté (Érasme, 1990, p. 76).

19Trindade (2001, p. 55) s’y réfère lors du débat organisé avec Caladine, Linard et Weissberg au colloque « Présence à distance » lorsqu’il évoque le rôle « irremplaçable » de l’enseignant « humain, affectif ». Pour Virat (2016), cette relation enseignant-élèves serait à rapprocher de la relation parent-enfant. Elle serait notamment manifeste dans l’attention que l’enseignant porte aux besoins des élèves et dans les réponses données permettant de proposer une sécurité affective. Pour Espinosa (2016, p. 142), cette relation enseignant-élèves « marquée par l’affectivité » aurait une influence sur l’apprentissage en ce qu’elle permettrait, par exemple, de modifier l’attitude de l’apprenant (qui peut être favorable ou défavorable à l’égard de la discipline enseignée), ou encore de renforcer la confiance en soi « susceptible de jouer un rôle important dans […] les apprentissages scolaires de l’élève ». Enfin, elle aurait une incidence sur la motivation des apprenants, laquelle dépend en grande partie selon Espinosa (2016, p. 145) des « expériences relationnelles scolaires et [de la] la relation de confiance […] que l’enseignant aura su établir entre lui et chacun de ses élèves ». Cette relation enseignant-élèves serait à envisager à des degrés variables, de l’absence de lien à une relation dont la dimension éducative s’étendrait au-delà de la relation pédagogique en classe lorsque par exemple le « contenu des interactions dépasse largement le domaine académique et touche à la vie personnelle et familiale de l’élève » (Virat, 2016, p. 420).

Éléments méthodologiques

Démarche

20La situation inédite du passage éclair au distanciel pour les enseignants de LV durant la période de confinement a constitué le point de départ d’une investigation à caractère exploratoire au sens que proposent Trudel, Simard et Vonarx (2006, p. 42) : « lorsque nous souhaitons circonscrire un objet de recherche, définir de nouvelles pistes de recherche, choisir des avenues théoriques ou identifier une méthode appropriée à l’objet et à nos objectifs de recherche, nous sommes dans le registre de la recherche exploratoire ». Il s’agissait pour nous de recueillir un certain nombre d’informations auprès d’enseignants de LV concernant leur expérience de l’enseignement à distance susceptibles de faire émerger, à la lecture des résultats, des axes de recherche. Pour ce faire, nous avons élaboré un questionnaire portant à la fois sur les ressentis des enseignants face à l’injonction du distanciel, sur leurs positionnements/avis à l’égard de l’utilisation du numérique dans l’enseignement des langues, ainsi que sur les principales activités d’apprentissage proposées à leurs élèves dans ce contexte. Une partie des réponses à l’enquête évoque l’absence de face à face en présentiel. À travers l’évocation des manques ressentis en mode distanciel, les enseignants nous livrent, en creux, ce qui, pour eux, est constitutif de la présence en classe de langue. C’est sur cette dimension que se concentre cet article. Il s’agissait ainsi plutôt de centrer notre analyse sur ce que peut sous-tendre la présence dans le contexte de la classe de langue, que sur ce qui participerait d’un manque de présence dans la distance renvoyant notamment à la question de l’affordance perçue (ou non) de l’artefact numérique.

Recueil des données

21Le questionnaire généré en ligne, a été diffusé durant 12 jours, du samedi 18 avril au vendredi 30 avril 2020, soit un mois après le début du confinement imposé par le gouvernement français. Il a été distribué au niveau national par le moyen d’une liste syndicale et de la lettre de l’Association des professeurs de langues vivantes (APLV) ainsi que par le biais de collègues enseignants exerçant en collège et lycée, cela principalement dans l’académie de Strasbourg. Il est d’ailleurs à noter que les retours ont été particulièrement importants dans cette académie puisque la moitié des enseignants qui ont répondu au questionnaire enseignent l’allemand dans cette académie. Les résultats sont donc aussi à considérer en tenant compte de ce paramètre. L’enquête comportait 10 questions fermées et 6 questions ouvertes. Les résultats présentés dans cette étude se rapportent à trois questions ouvertes et une fermée.

  • Aujourd’hui, que pensez-vous de cette situation d’enseignement à distance ?

  • Quelles sont pour vous les difficultés de l’enseignement-apprentissage des langues vivantes à distance ?

  • Suite au passage au distanciel, comment estimez-vous la qualité de votre enseignement sur une échelle de 1 à 5 ?

  • Pourriez-vous dire pour quelle(s) raison(s) vous estimez ainsi la qualité de votre enseignement ?

Traitement et analyse des données

  • 3 Chaque répondant est identifié par un code commençant par E (pour enseignant) et un numéro d’ordre.

22Le traitement et l’analyse de ces données « convoquées » (Van der Maren, 2003, p. 139) relèvent d’une approche qualitative renvoyant essentiellement à une analyse thématique de contenu selon les procédés qui s’y rattachent : lecture balayage de l’ensemble des réponses, formation de catégories thématiques et comptage des occurrences. Les réponses à chacune des trois questions ouvertes retenues ont été traitées de manière similaire. Par exemple, les réponses correspondant à la question sur les difficultés de l’enseignement-apprentissage des LV à distance pour les enseignants ont fait apparaître une fréquence d’occurrences portant sur l’impossibilité (ou quasi-impossibilité) d’interagir à l’oral comme en classe, sur la difficulté de suivre les élèves en distanciel et, sur le manque de contact réel, « l’absence de contact, de présence physique » (E303). Nous avons ensuite scindé les catégories afin de pouvoir approfondir l’analyse. Ainsi la catégorie du « suivi » comprend d’autres ensembles d’occurrences se rattachant par exemple à ce qui relèverait d’un accompagnement inefficace par manque de visibilité et à une perte de contrôle sur le travail des élèves (qui peuvent alors tricher). Nous avons ensuite conduit l’analyse qualitative de ces thématiques en nous appuyant sur les apports théoriques relatifs à la question de la présence. Nous avons aussi parfois eu recours à une analyse des traces de l’énonciation dans les déclarations des répondants, cela notamment lorsqu’il s’est agi de rendre compte du degré d’implication des enseignants dans leurs propos. Ces marqueurs énonciatifs permettent le plus souvent de souligner le caractère affectif des énoncés comme nous le verrons dans l’analyse.

Premières données sur les répondants et le contexte technologique d’enseignement

23115 enseignants notés (E + numéro du répondant) de LV exerçant dans les établissements du secondaire en France (54% enseignent en lycée et 46% en collège) ont répondu au questionnaire. L’échantillon comprend 83,5% de femmes et 16,5% d’hommes. Les catégories d’âge sont toutes représentées de manière quasi équivalente à l’exception des deux pôles 26 - 30 ans et 61 - 65 ans (6% pour chaque catégorie). Les langues enseignées sont l’allemand pour environ 51% des répondants, l’anglais pour environ 23,5%, l’espagnol pour environ 22%, auxquelles s’ajoutent de façon minoritaire l’italien (environ 3%) l’arabe, le breton, et l’occitan. Le nombre d’élèves par enseignant est variable allant de moins de 10 élèves à plus de 70 avec toutefois une majorité de répondants ayant entre 21 et 30 élèves (ils sont 65% en collège et 50% en lycée à avoir en charge ce nombre d’élèves). Pour ce qui concerne l’expérience d’enseignement ou d’apprentissage à distance des répondants, 91,5% déclarent n’avoir jamais enseigné à distance et 61% n’avoir jamais suivi de formation à distance. 9,5% ont appris une langue étrangère à distance et 29,5% ont suivi une formation à distance.

24Les déclarations des répondants correspondant aux outils numériques utilisés durant cette période d’enseignement à distance (et non utilisés avant la fermeture de leur établissement) sont par ordre d’importance : la messagerie électronique (email) pour 48,5% des enseignants, l’environnement numérique de travail (ENT) pour 43%, un service de partage de documents (Google Drive, Onedrive, Framapad ...) pour 28,5%, un service de visioconférence pour 27,5%, un service de diffusion vidéo (YouTube, Viméo, Dailymotion) pour 26% (il est à noter que 75% des enseignants déclaraient déjà utiliser les TIC en classe pour exposer leurs élèves à la L2), un service de messagerie instantanée (WhatsApp, Viber, Telegram, …) pour 17%, un service de podcast audio ou de diffusion audio (Sound coud, M-xcloud ...) pour 6%, et un réseau social (Facebook, Edmodo …) pour 3,5%. Une mise en correspondance de ces données avec les résultats portant sur les activités langagières proposées régulièrement aux élèves dans ce contexte en distanciel (Figure 1) tend à révéler une concordance entre l’importance des activités écrites (compréhension et production écrites) et les principaux choix des artefacts (notamment email, ENT, service de document partagé).

Figure 1 : activités langagières et compétences régulièrement travaillées avec les élèves durant la période d’enseignement en distanciel (en %)

Figure 1 : activités langagières et compétences régulièrement travaillées avec les élèves durant la période d’enseignement en distanciel (en %)

25En revanche, la faiblesse du pourcentage lié à l’interaction orale (2,5%) pose question au regard des 27,5% renvoyant à l’utilisation d’un service de visioconférence. Cela conduit à émettre deux hypothèses. La première concernerait une possible indistinction par les répondants entre la production orale et l’interaction orale (les valeurs cumulées de production et d’interaction orales (25%) correspondant sensiblement à celle de la visioconférence (27,5%). La seconde supposerait une perception et/ou une utilisation faible des affordances de l’artefact de visioconférence qui offre des possibilités de travailler l’interaction orale en langue cible (et non seulement la production).

Résultats et analyse

26Un mois après le début de l’enseignement à distance imposé dans l’urgence, 22,6% des enseignants estimaient la situation d’enseignement à distance satisfaisante (6,6%) ou acceptable (16%) car considérée comme temporaire (« on fait avec » (E80) ; « C’est une solution qui doit être temporaire ou complémentaire » (E25)). En revanche, 77,4% la considéraient comme insatisfaisante. Les déclarations relatives à cette appréciation renvoyaient principalement au travail de l’enseignant considérablement accru dans ces conditions (pour environ 22% des enseignants) et aux difficultés liées à l’enseignement d’une langue vivante en distanciel (pour environ 60% des répondants). Ces dernières se rapportent à la distance vécue par les enseignants de LV entre eux et leurs élèves, conduisant d’une part à une forte diminution de leur possibilité de suivre de manière efficiente le travail des élèves, d’autre part à une altération de la relation enseignant-élèves considérée comme intrinsèque à la qualité de l’enseignement-apprentissage des LV.

Distance et perte de visibilité

27Pour environ un tiers des répondants, la distance constitue un obstacle au suivi efficient du travail des élèves. Plus précisément, 33% évoquent leurs difficultés à suivre les élèves lorsqu’ils donnent leur avis sur la situation un mois après le confinement, 36,6% estiment que leur enseignement a perdu en qualité pour cette raison, et 41% considèrent que cela constitue l’une des principales difficultés de l’enseignement des langues en distanciel.

28La difficulté à accompagner de façon efficace les élèves se dit principalement à travers une perte de visibilité (pour environ la moitié des répondants) :

Je ne vois pas ce que les élèves font sur leur ordi (E15).

Ne pas voir à quel endroit ils ont des difficultés (E89).

Il est difficile d’avoir une vue d’ensemble sur la motivation, les diverses difficultés des élèves (E110).

Je n’ai pas de retours de certains élèves, je ne sais pas vraiment où ils en sont (E85).

Ce n’est pas une solution durable, car elle ne permet pas le suivi comme en classe (E10).

29Cette impossibilité de voir de manière satisfaisante ce que font les élèves génère un sentiment de frustration (« frustration. On ne sait pas où en sont certains élèves » (E11)) et d’impuissance (« peu "d’emprise" sur celles et ceux qui décrochent » (E104) ; « Si un élève ne veut pas se connecter on n’arrive pas à l’y forcer » (E1) ; « il est impossible d’obliger les élèves à travailler » (E52)). La distance ne semble plus permettre de maîtriser le travail des élèves comme en présentiel : « les élèves à la maison ne travaillent pas de manière efficace » (E19).

30Ils sont aussi environ un tiers à évoquer la question du décrochage (« Beaucoup d’élèves décrochent » (E28)) qui concerne le plus souvent les élèves les plus fragiles en termes d’apprentissage et/ou de moyens :

Les moins compétents ont tendance à décrocher (E103).

Cela pénalise également les élèves les plus fragiles (pas d’accès à Internet ou à un ordinateur, ou partage d’un seul ordinateur dans une fratrie ou toute la famille, pas d’imprimante...) (E23).

31Pour un quart des répondants qui évoque le problème de suivi comme principale difficulté de l’enseignement d’une LV à distance, le fait de ne plus voir renvoie également à l’impossibilité « de vérifier ce que les élèves font vraiment » (E80) :

Impossibilité de vérifier si l’élève utilise un traducteur, s’il lit son texte quand il s’enregistre, etc. (E17)

Impossibilité de noter les élèves, car ils "trichent" en utilisant Google traduction ou autre. Même en leur disant que ce n’est pas noté, certains "trichent"... (E52).

32Enfin, cette difficulté à suivre les élèves s’exprime aussi à travers le sentiment d’une perte :

J’ai l’impression de perdre mes élèves (E94) 

L’absence d’environ 20% de mes élèves me perturbe énormément (E33)

Une partie des élèves nous échappe (E101).

33La distance semble ainsi mettre à mal ce que sous-tend la relation enseignant-élèves. Au niveau institutionnel d’abord, dans le sens où l’enseignant est investi de la responsabilité du parcours de ses élèves durant une période donnée en fonction d’un certain nombre d’objectifs d’enseignement-apprentissage à atteindre. Cette relation renvoie à la relation pédagogique en tant que « relation professionnelle entre un enseignant et ses élèves autour de la transmission de savoirs » (Espinosa, 2016, p. 146), elle s’exprime notamment à travers le sentiment de frustration de ne pas « connaître vraiment les apprentissages et les difficultés » (E78), « ne pas pouvoir apporter [de l’] aide aux élèves en réelle difficulté » (E89).

34Cette relation enseignant- élèves implique aussi, comme le rappelle Espinosa (2016), un rapport asymétrique avec ce « pouvoir socialement et institutionnellement défendu de l’enseignant sur l’élève [qui] ne peut qu’influencer leur relation » (Hess & Weigand, 1994, p. 14). Cette dimension relationnelle transparaît particulièrement dans les déclarations portant sur l’impossibilité de vérifier ce que les élèves font et dans quelle mesure « ils "trichent" » (E52) par exemple.

35Enfin, une autre dimension de la relation enseignant-élève semble émerger se rattachant à la responsabilité de l’enseignant, mais davantage dans le sens d’une relation parentale que l’on pourrait interpréter dans cette déclaration : « j’ai perdu beaucoup d’élèves de vue, car je ne suis plus "derrière eux" » (E103) ou dans cette autre « J’ai l’impression de perdre mes élèves » (E94) où transparaît un lien affectif avec l’emploi du possessif. Cette relation particulière comportant une dimension affective dont parle notamment Espinosa (2016) (et qui est manifeste dans la suite des résultats, comme nous le verrons) constitue selon nous l’une des spécificités de la relation enseignant-élève jusqu’à la fin du secondaire, car elle est inhérente au profil particulier des apprenants en termes de maturité comme l’indique l’un des répondants « ils n’ont pas la maturité […] ce sont des élèves » (E110).

36Ne plus voir les élèves au sens physique semble ainsi remettre en cause les différentes dimensions de la relation enseignant-élèves liée notamment au rôle de l’enseignant comme l’indique ce répondant : « ne plus être en présentiel change ma posture professionnelle de fond en comble » (E33).

Distance et mise à mal de la relation enseignant-élève

37Lorsque les enseignants donnent leur avis sur la situation un mois après le confinement, ils sont 29,5% à considérer qu’elle est insatisfaisante, car elle ne peut « remplac[er] un cours en face à face » (E96), « ne remplace en rien le face à face physique » (E69). Ils sont environ 45% à invoquer cette raison pour justifier que leur enseignement a perdu en qualité. Enfin pour 62,5% des répondants, le fait de ne pouvoir faire cours en présentiel représente la principale difficulté de l’enseignement à distance.

38Lorsque les enseignants de LV s’expriment sur ce qu’ils considèrent comme intrinsèque à l’efficience d’un cours de langue, ils évoquent principalement le contact direct avec les élèves. Ce contact (« pas de contact direct avec les élèves » (E2)) renvoie d’abord à une présence physique incarnée et sensible (« Manque de contact "réel" avec les élèves » (E61) ; « Je ne conçois pas mon métier en parlant dans le vide. J’ai besoin de voir, d’entendre » (E70) ; « il n’y a pas assez de proximité. La raison est qu’avant, j’avais les élèves face à moi » (E29)).

39L’évocation de cette présence physique se rattache notamment au fait de voir les élèves tous « en même temps » (E73), et de percevoir leurs besoins : « être en face à face avec les élèves permet d’apporter plus précisément ce qu’ils ont besoin » (E21) ; « [à distance] impossible de voir la réaction des élèves » (E61) ; « Impossible de voir la réaction des élèves : comment réagissent-ils face à l’exercice ? Quelles sont les difficultés rencontrées ? » (E61). L’absence de présence ne permet plus de saisir ce qui se dit aux niveaux verbal et non verbal :

Je ne peux pas réagir à des "non-questions" des élèves. Il y en a beaucoup qui ne savent pas poser de questions. En cours, on les repère et on propose des solutions. Là, ils sont tout seuls à la maison et personne ne réagit puisqu’ils continuent à ne pas poser de questions (E70).

Tout ce qu’on peut percevoir et adapter dans un contact direct avec un groupe classe disparaît (E102).

40De fait, l’absence de contact se rapporte aussi à l’absence « d’interaction didactique » à « l’interaction dite de classe » (Cicurel, 1984, 2002) en distanciel. Pour les répondants, cette interaction qui ne semble pouvoir être mise en œuvre à distance se définit d’abord en lien avec la temporalité du face à face permettant de réagir dans l’instant « pour expliquer tout de suite si besoin » (E76) « pour faire corriger en direct les erreurs de prononciation » (E24), « reformuler » (E115) et d’accompagner simultanément les élèves : « impossible de corriger chaque élève, ou même plusieurs (contrairement à ce qu’on peut faire en se penchant rapidement sur un cahier) ; impossible de voir en cours d’activité quels élèves sont en difficulté ; […] impossible d’avoir des retours immédiats des élèves, des questions, etc. » (E65). Cette interaction est également caractérisée en lien avec la multimodalité de la parole (Tellier, 2009) du côté de l’enseignant (« Il manque le geste pour l’explication, il manque le mouvement, il manque les variations de ton... » (E37) ; « La présence physique est indispensable pour faire passer certains messages » (E45), comme du côté des élèves :

Tout ce qui ne peut pas se faire : l’oralité, l’interaction, l’explicitation, l’émergence d’idées, la focalisation sur telle chose-image, structure de phrases, techniques, les émotions (humour, sourcils froncés, signe d’encouragement ou de désapprobation sans paroles...) (E37).

Parce que je ne peux pas réagir à des "non-questions" des élèves. Il y en a beaucoup qui ne savent pas poser de questions. En cours, on les repère et on propose des solutions. Là, ils sont tout seuls à la maison et personne ne réagit puisqu’ils continuent à ne pas poser de questions (E70).

41L’interaction en classe renvoie aussi à l’une des spécificités de l’enseignement-apprentissage des langues étrangères que les répondants considèrent difficilement transférable en distanciel : « adapter un enseignement qui est ordinairement fondé sur l’interaction » (E31). L’enseignement à distance ne semble plus guère permettre d’interagir à l’oral en LV : « absence d’interaction, l’oral est inexistant » (E88) ; « Aucune interaction pour l’oral » (E77) ; « pas d’oral en interaction » (E40) ; « Impossible de faire de l’interaction […] orale de qualité » (E57). Pour les répondants, l’efficience de l’interaction orale en L2 se rattache d’une part à la coprésence physique des interactants et à la dimension multimodale de la parole engageant tout le corps :

Le V de LV passe par le rapport humain direct, "en présentiel" (E48).

La communication orale, pilier de l’enseignement en langues, ne repose pas seulement en un échange de supports de travail aussi varié soit-il, mais bien en la présence physique de l’interlocuteur dont la mimique, le regard, la gestuelle, etc. participent à l’échange (E69).

42D’autre part, la mise en œuvre des échanges oraux semble reposer sur la dimension collective de l’interaction difficile à réaliser en distanciel :

Les cours de L2 [sont] basés sur l’interaction entre élèves (E50).

Pas d’interaction de groupe (E40).

Pas d’interaction, pas de bain linguistique, pas d’écoute des autres élèves (E66).

Pas d’interaction orale entre les élèves (E108).

43La classe de langue est ainsi envisagée « comme un lieu de parole et de socialisation » (Cicurel, 2002, p. 147) : « Apprendre des langues vivantes implique une dimension de socialisation non négligeable pour mettre les élèves en conditions réelles » (E47).

44Le groupe constitué par les apprenants apparait aussi être l’un des ressorts des pratiques enseignantes, d’une part pour dynamiser l’interaction orale en LV, d’autre part pour coconstruire les savoirs et savoir-faire :

La distribution de la parole est ciblée d’abord sur les élèves moteurs ce qui va rendre le cours plus vivant (E19).

Lémulation que l’on trouve en classe n’est pas présente (E50).

Construire une phrase. En LV, cela se fait souvent à plusieurs, l’un chuchote un mot, l’autre tente un autre mot. Avec de grands gestes, on essaie de leur dire de rapprocher leurs tentatives. On construit, on ajuste, on fait répéter... on accouche (vraiment) d’une construction collective, ce qui est juste im-pos-si-ble par ordinateur (E37).

45Le cours progresse ainsi grâce aux apports des élèves « en co-construisant ensemble en classe » (E57). Cette pratique donne aussi la possibilité d’une plus grande liberté dans la gestion du cours. Les répondants se réfèrent aussi à l’une des spécificités du face à face en classe, un cheminement du cours laissant la place à l’imprévu (Cadet et Cicurel, 2017). Cette dimension de la présence relative à la spontanéité et à l’imprévisibilité de l’échange renvoie au plan théorique à l’une des caractéristiques de l’enseignant expert capable d’adaptation (« adapter le cours spontanément aux élèves » (E65)) et d’improvisation « en fonction de son public » (E115). Elle permettrait aussi pour certains une certaine « malléabilité » ancrée dans la vie, contrairement au cours à distance qui se présenterait comme un bloc figé :

Mon enseignement actuel n’est plus lié à une expérience de vie. Les illustrations d’avant me venaient des élèves, du temps, de l’heure, de l’ambiance, de l’actualité... J’adaptais mon enseignement au public de chacune de mes classes (E72).

À distance tout est ficelé d’avance (E37).

46Enfin, la présence en classe semble aussi renvoyer à une dimension relationnelle affective disparaissant dans l’enseignement en distanciel tel qu’il est vécu par certains enseignants, « déshumanisé » (E99) :

Ils me manquent, les élèves (E95)

Aucune interaction humaine/humaniste n’est possible (E37)

Il n’y a pas déchanges, pas de complicité (E36).

On plaisante pendant le cours pour détendre quand on exige beaucoup de réflexion sur tel ou tel point... (E115).

Il manque l’essentiel : lhumain, le visage, un air ironique, un sourire gentiment moqueur, une mine étonnée, un eurêka dans le regard... tout ce qui fait que malgré les difficultés, ce métier est attachant (E37).

47Elle correspond à cette relation transférentielle parent-enfant évoquée dans la première partie de l’analyse, allant « au-delà, ou en plus, du savoir à transmettre, transmis, à acquérir ou acquis » (Espinosa, 2016, p. 144). Elle transparait notamment dans l’inquiétude des difficultés que peuvent vivre les élèves alors hors de portée :

Beaucoup délèves ont exprimé que la présence physique de l’enseignant, rassurante et humaine (!), leur manquait. Les élèves […] se heurtent à de multiples difficultés d’ordre social et familial (E69).

La gestion et le suivi de mes élèves au quotidien au niveau pédagogique (ça « roule » seulement pour qui ça roule déjà à la base, mais, et tous les autres ... ?) et le suivi de mes élèves au niveau humain (en présentiel, on les suit dans leur histoire « personnelle » aussi : on voit qui est fatigué, triste, heureux, tranquille, surexcité ce jour-là... et on sait pourquoi en général, avant, pendant ou après, mais on sait et donc on adapte. Là on ne sait quasiment rien de la très grande majorité...). Qui suit vraiment, qui ne suit pas, pourquoi, où ça bloque, comment ça va, comment ça va à la maison, qui est en décrochage, qui a besoin de moins / de plus, etc. ? Mystère. Le prof avance seul pour ainsi dire ... le prof travaille bien ! Les élèves... ? (à part ceux pour qui tout roulait déjà à la base) (E87).

48Ainsi plus généralement, le face à face physique semble constituer le socle sur lequel se construit la singularité de la classe de langue en termes de temps, de lieu et de liens particuliers. La présence renvoie à l’espace circonscrit de la classe où l’enseignant peut « voir tous [les élèves] en même temps » (E73) et « voir comment les élèves réagissent et s’adapter » (E81). Elle se rattache aussi à une temporalité certes planifiée, mais dont on sait qu’elle peut être « mise à l’épreuve au moment du cours et de la rencontre avec une force de coopération ou de résistance émanant de la part des apprenants » (Cadet et Cicurel, 2017, p. 248). Elle sous-tend cette marge de liberté dont dispose l’enseignant-expert pour s’adapter aux imprévus et improviser, mettant en œuvre ses « stratégies expertes » (Linard, 1994, p.52) ou « tactiques » (Cicurel, 2002, p.153). Enfin, la présence se rapporte à la question du lien, celui qui se crée dans l’échange hic et nunc de la classe voire au-delà, mettant en jeu les différentes dimensions de la relation enseignant-élèves.

Conclusion

49Les résultats montrent que les enseignants de LV interrogés semblent pour une grande part encore bien attachés à « cette expérience de présence réduite à la présence "physique" » comme l’indiquait Jacquinot-Delaunay (2001, p.186) il y a 20 ans. Ils révèlent aussi que l’interaction en est le cœur et qu’elle procède bien « [d’]une dynamique relationnelle créée et vécue par les sujets psychologiques et sociaux que sont les apprenants et les formateurs » (Jézégou, 2019, p. 194). De fait, les résultats concernant l’absence ou le manque d’interactions entre les enseignants et les élèves durant cette expérience d’enseignement à distance seraient à considérer, d’une part, en lien avec une possible non-perception des affordances des artefacts (de visioconférence par exemple), d’autre part, en lien avec la formation insuffisante des enseignants à la mise en œuvre d’une didactique médiatisée par le numérique. Car, comme le rappellent Guichon et Tellier (2017, p. 25), « l’utilisation de [...] nouveaux outils de communication à des fins pédagogiques » passe par un apprentissage et une « formation spécifique ».

50En revanche, ils mettent aussi au jour que le sens de présence peut être défini en relation avec le contexte de la formation. La présence pour les répondants relève en partie d’une relation enseignant-élèves particulière, inhérente au dispositif institutionnel. La présence des élèves à l’école est obligatoire et c’est bien dans ce cadre-là que se construit (ou non) du lien, un lien social particulier, avec une distribution du pouvoir asymétrique et un lien potentiellement affectif corrélé au précédent, de l’ordre de la relation parentale, circonscrite au temps de la classe ou au-delà, lorsque l’enseignant se réfère à ce qui relève de « l’histoire personnelle » (E87) des élèves. Dans un contexte distanciel, il ne s’agirait donc pas seulement d’apprendre à créer de la présence en cherchant par exemple à recréer « la chaleur d’une interaction » (Guichon, 2017, p. 31) pour développer une relation socio-affective, mais de trouver aussi les moyens de transposer ce rôle particulier assigné à l’enseignant du secondaire, sorte de garant des règles institutionnelles (école obligatoire) et figure parentale, ou de le faire disparaitre et de fait, de remettre en question un modèle scolaire.

51Enfin, il nous semble important de rappeler que les résultats de cette étude ne peuvent être envisagés sans rappeler d’abord la situation particulière d’urgence et d’impréparation des enseignants et des élèves au passage en distanciel sur les plans méthodologique et de l’équipement technique. Ceci permet de souligner l’importance de former les enseignants de LV à une pédagogie du distanciel appropriée, intégrant notamment des activités d’interactions permettant, d’une part, de travailler ces types d’activités langagières et, d’autre part, de créer, voire de renforcer un sentiment de présence. À cela s’ajoute la situation de distanciation physique contrainte dans laquelle se trouvaient les enseignants de LV comme le reste de la population durant ces quelques mois de l’année 2020. Le manque ressenti de présence physique en tant que « modèle principal de la relation humaine » pour reprendre Weissberg (2001, p.31) exprimé parfois si fortement par les répondants doit aussi dans une certaine mesure être rattaché au contexte social de l’enquête où « manqu[ait] la vie ! » (E45).

Haut de page

Bibliographie

Androwkha, S. et Jézégou, A. (2020). La présence à distance en e-Formation : entretien avec Annie Jézégou. Médiations et médiatisations, 3, 59‑67. Récupéré de : https://revue-mediations.teluq.ca/index.php/Distances/article/view/116/85

Borg, S. (2006). The distinctive characteristics of foreign language teachers. Language Teaching Research, 10(1), 3–31. Récupéré de : http://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.132.6475&rep=rep1&type=pdf

Bourdet, J.-F. (2010). La formation d’enseignants et futurs enseignants de langue dans un dispositif EAD. Distances et savoirs, 8(3), 325‑344. Récupéré de : https://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2010-3-page-325.htm

Cadet, L. et Cicurel, F. (2017). Réfléchir les pratiques enseignantes. De l’analyse des interactions didactiques à l’analyse des discours sur les pratiques. Dans N. Guichon et M. Tellier (dir.), Enseigner l’oral en ligne. Une approche multimodale (p. 243‑265).

Cicurel, F. (1984). La construction de l’interaction didactique. Études de linguistique appliquée, (55), 47‑56.

Cicurel, F. (2002). La classe de langue un lieu ordinaire, une interaction complexe. Acquisition et interaction en langue étrangère, (16), 145‑164. Récupéré de : https://journals.openedition.org/aile/801

Colletta, J.-M. (2004). Le développement de la parole chez l’enfant âgé de 6 à 11 ans. Corps, langage et cognition. Belgique : P. Mardaga.

Cosnier, J. et Develotte, C. (2011). Le face à face en ligne : approche éthologique. Dans C. Develotte, R. Kern et M.-N. Lamy (dir.), Décrire la conversation en ligne. Le face à face distanciel (p. 27‑50). Lyon : ENS.

Develotte, C. (2009). From face to face to distance learning: the online learner’s emerging identity. Dans Learning Cultures in Online Education (p. 71‑92). New York : Continuum. Récupéré de : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00372902v2

Develotte, C., Kern, R. et Lamy, M.-N. (2011). Décrire la conversation en ligne. Le face à face distanciel. Lyon : ENS.

Espinosa, G. (2016). Affectivité, relation enseignant/e-élève et rapport à l’enseignant/e : Contribution à une réflexion sur les caractéristiques d’une relation réussie. Recherches en Éducation, (26), 143‑154. Récupéré de : https://hal.univ-lorraine.fr/hal-01618220

Flewitt, R. et Lamy, M.-N. (2011). Describing online conversations: Insights from a multimodal approach. Dans C. Develotte, R. Kern et M.-N. Lamy (dir.), Décrire la conversation en ligne. Le face à face distanciel (p. 71‑94). Lyon : ENS.

Garrison, D. R. et Anderson, T. (2003). E-Learning in the 21st century: a framework for research and practice. New York : Routledge.

Garrison, D. R., Anderson, T. et Archer, W. (1999). Critical inquiry in a text-Based environment : computer conferencing in higher education. The Internet and Higher Education, 2(2‑3), 87‑105.

Guichon, N. (2012). Vers l’intégration des TIC dans l’enseignement des langues. Paris : Didier.

Guichon, N. (2017). Se construire une présence pédagogique en ligne. Dans N. Guichon et M. Tellier (dir.), Enseigner l’oral en ligne. Une approche multimodale (p. 29‑58). Paris : Didier.

Guichon, N. et Tellier, M. (2017). Enseigner l’oral en ligne. Une approche multimodale. Paris : Didier.

Hess, R. et Weigand, G. (1994). La relation pédagogique. Paris : A. Colin.

Jacquinot, G. (1993). Apprivoiser la distance et supprimer l’absence ? Ou les défis de la formation à distance. Revue française de pédagogie, 102, 55‑67.

Jacquinot-Delaunay, G. (2001). Le sentiment de présence. Deuxièmes Rencontres Réseaux Humains / Réseaux Technologiques, 183‑191. Récupéré de : http://rhrt.edel.univ-poitiers.fr/documentb52f.html?id=773

Jézégou, A. (2007). La distance en formation. Premier jalon pour une opérationnalisation de la théorie de la distance transactionnelle. Distances et savoirs, 5(3), 341‑366. Récupéré de : http://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2007-3-page-341.htm

Jézégou, A. (2008). Formations ouvertes et autodirection de l’apprenant. Savoirs, 1(16), 97‑115. Récupéré de : http://www.cairn.info/revue-savoirs-2008-1-page-97.htm

Jézégou, A. (2010). Créer de la présence à distance en e-learning. Cadre théorique, définition, et dimensions clés. Distances et savoirs, 8(2), 257‑274. Récupéré de : http://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2010-2-page-257.htm

Jézégou, A. (2019). La distance, la proximité et la présence en e-Formation. Dans A. Jézégou, Traité de la e-Formation des adultes (p. 143‑165). Récupéré de : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-01951530/document

Kiyitsioglou-Vlachou, C. et Moussouri, E. (2010). Approche sociolinguistique et didactique du facteur « distance » dans la formation des enseignants du FLE. Distances et savoirs, 8(3), 475‑488. Récupéré de : https://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2010-3-page-475.htm

Linard, M. (1995). La distance en formation : une occasion de repenser l’acte d’apprendre. In G. Davies et D. Tinsley (dir.), Accès à la Formation à Distance, Clés pour un Développement Durable (p. 46‑55). Récupéré de : https://hal-univ-tlse3.archives-ouvertes.fr/TICE/edutice-00000272v1

Mangenot, F. (2011). Spécificités du tutorat en langues. Dans C. Depover, B. De Lièvre, D. Peraya, J.-J. Quintin et A. Jaillet (dir.), Le tutorat en formation à distance (p. 213‑226). Bruxelles : De Boeck.

Nissen, E. (2019). Pourquoi mettre à contribution le numérique dans l’enseignement des langues à l’école ? Conférence de consensus « De la découverte à l’appropriation des langues vivantes étrangères : comment l’école peut-elle mieux accompagner les élèves ? » (120‑132). Courbevoie : Conseil national d’évaluation du système scolaire. CNESCO. Récupéré de : http://www.cnesco.fr/wp-content/uploads/2019/04/CCLV_Nissen_MEF-v2.pdf

Paquelin, D. (2011). La distance : questions de proximités. Distances et savoirs, 9(4), 565‑590. Récupéré de : https://www.cairn.info/revue-distances-et-savoirs-2011-4-page-565.htm#

Peraya, D. (2014). Distances, absence, proximités et présences : des concepts en déplacement. Distances et médiations des savoirs, 8. Récupéré de : https://doi.org/10.4000/dms.865

Soubrié, T. (2016). Former les enseignants à l’intégration pédagogique des TIC : une tâche difficile. Dans C. Ollivier, T. Gaillat et L. Puren (dir.), Numérique et formation des enseignants de langue : Pistes et imaginaires. Paris : Éd. des Archives Contemporaines.

Tellier, M. (2008). Dire avec des gestes. Le Français dans le monde. Recherches et applications, 44, 40‑50.

Tellier, M. (2009). Usage pédagogique et perception de la multimodalité pour l’accès au sens en langue étrangère. Dans Bergeron (dir.), La place des savoirs oraux dans le contexte scolaire d’aujourd’hui (p. 223‑245). Presses de l’université du Québec. Récupéré de : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-00378849

Traverso, V. (2011). Chevauchements de parole, résolution et réparation dans la conversation en ligne. Dans C. Develotte, R. Kern et M.-N. Lamy (dir.), Décrire la conversation en ligne : Le face à face distanciel (p. 117‑143). Lyon : ENS.

Trindade, A. R., Linard, M. et Weissberg, J.-L. (2001). Débat - Outils de communication et présence humaine. Actes des Deuxièmes Rencontres Réseaux Humains/Réseaux Technologiques, 51‑55. Récupéré de : http://rhrt.edel.univ-poitiers.fr/document715c.html?id=433

Trudel, L., Simard, C. et Vonarx, N. (2007). La recherche qualitative est-elle nécessairement exploratoire ? Recherche qualitative en sciences humaines et sociales : les questions de l’heure, 5, 38‑45.

Vallaud-Belkacem, N. (2017). Discours prononcé par la ministre de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et la Recherche pour l’ouverture de la première édition du salon EduSpot présenté à Paris. Récupéré de : https://www.najat-vallaud-belkacem.com/2017/03/08/ouverture-du-salon-eduspot-discours-de-najat-vallaud-belkacem/

Van der Maren, J.-M. (2003). La recherche appliquée en pédagogie : des modèles pour l’enseignement. Bruxelles : De Boeck.

Virat, M. (2016). Dimension affective de la relation enseignant-élève avec les adolescents : Revue des études longitudinales et perspective de l’attachement. Revue de psychoéducation, 45(2), 405‑430. Récupéré de : https://www.erudit.org/fr/revues/psyedu/2016-v45-n2-psyedu02956/1039055ar.pdf

Weissberg, J.-L. (2001). Entre présence et absence. Outils de communication et présence humaine. Actes des Deuxièmes Rencontres Réseaux Humains / Réseaux Technologiques, 31‑39. Récupéré de : http://rhrt.edel.univ-poitiers.fr/document9a31.html?id=429

Haut de page

Notes

1 Cf. circulaire du 13 mars 2020 laquelle invoque, pour assurer cette continuité, l’utilisation des plateformes institutionnelles (ENT) et de la classe virtuelle du CNED.

2 Jacquinot-Delaunay (2000) donnait à ce propos l’exemple des cours magistraux qu’elle avait suivis avec le Pr. Etiemble qui « pensait tout haut », ce qui permettait de susciter la pensée des étudiants : « Quelqu’un qui pense tout haut vous aide à penser. L’interaction mentale était maximale, certes, à condition d’accepter et/ou de pouvoir « entrer dans le discours ».

3 Chaque répondant est identifié par un code commençant par E (pour enseignant) et un numéro d’ordre.

Haut de page

Table des illustrations

Titre Figure 1 : activités langagières et compétences régulièrement travaillées avec les élèves durant la période d’enseignement en distanciel (en %)
URL http://journals.openedition.org/dms/docannexe/image/6134/img-1.png
Fichier image/png, 95k
Haut de page

Pour citer cet article

Référence électronique

Emmanuelle Croze, « Covid-19 et passage éclair au distanciel pour les enseignants de langues vivantes du secondaire : une expérience renvoyant à l’irréductible présence en classe de langue  »Distances et médiations des savoirs [En ligne], 33 | 2021, mis en ligne le 07 mars 2021, consulté le 29 mars 2024. URL : http://journals.openedition.org/dms/6134 ; DOI : https://doi.org/10.4000/dms.6134

Haut de page

Auteur

Emmanuelle Croze

Université de la Réunion, Département de français langue étrangère emmanuelle.croze@gmail.com

Haut de page

Droits d’auteur

CC-BY-SA-4.0

Le texte seul est utilisable sous licence CC BY-SA 4.0. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.

Haut de page
Rechercher dans OpenEdition Search

Vous allez être redirigé vers OpenEdition Search