Effets de la vaccination et des mesures de santé publique sur les cas de COVID-19 au Canada 

RMTC

Volume 48-7/8, juillet/août 2022 : Infections associées aux soins de santé & résistance aux antimicrobiens

Aperçu

Scénarios contrefactuels des effets de la vaccination et des mesures de santé publique sur les cas de COVID‑19 au Canada : qu'est‑ce qui aurait pu arriver?

Nicholas H Ogden1, Patricia Turgeon1, Aamir Fazil1, Julia Clark2, Vanessa Gabriele‑Rivet1, Theresa Tam2, Victoria Ng1

Affiliations

1 Division de la science des risques pour la santé publique, Laboratoire national de microbiologie, Agence de la santé publique du Canada, Saint‑Hyacinthe, QC et Guelph, ON

2 Bureau de l'administratrice en chef de la santé publique, Agence de la santé publique du Canada, Ottawa, ON

Correspondance

nicholas.ogden@phac-aspc.gc.ca

Citation proposée

Ogden NH, Turgeon P, Fazil A, Clark J, Gabriele‑Rivet V, Tam T, Ng V. Scénarios contrefactuels des effets de la vaccination et des mesures de santé publique sur les cas de COVID‑19 au Canada : qu'est‑ce qui aurait pu arriver? Relevé des maladies transmissibles au Canada 2022;48(7/8):322–33. https://doi.org/10.14745/ccdr.v48i78a01f

Mots-clés : COVID‑19, Canada, vaccination, mesures de santé publique, contrefactuel, modélisation

Résumé

Cette étude illustre ce qui aurait pu arriver, en ce qui concerne les infections, les hospitalisations et les décès liés à la maladie à coronavirus 2019 (COVID‑19) au Canada, si des mesures de santé publique n'avaient pas été utilisées pour contrôler l'éclosion de COVID‑19 et si les restrictions avaient été levées avec de faibles taux de vaccination, ou aucune vaccination, de la population canadienne. La chronologie de l'éclosion au Canada et les interventions de santé publique utilisées pour la contrôler sont examinées. Des comparaisons avec les résultats obtenus dans d'autres pays et des modèles contrefactuels illustrent le succès relatif du contrôle de l'éclosion au Canada. Ensemble, ces observations montrent que sans l'application de mesures restrictives et sans niveaux élevés de vaccination, le Canada aurait pu connaître un nombre substantiellement plus élevé d'infections et d'hospitalisations et près d'un million de décès.

Introduction

Le coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2 (SRAS‑CoV‑2), a provoqué une pandémie, car 1) il est hautement transmissible d'un humain à l'autre et 2) au moment de la propagation aux humains, il n'y avait aucune immunité connue au virus dans la population humaine mondiale. Les pandémies ne prennent fin que lorsqu'une proportion suffisante de la population est immunisée (après une infection ou une vaccination) pour provoquer l'extinction du pathogène en cause ou une forme quelconque d'état endémique mondial qui se produit en raison de la diminution de l'immunité dans la population humaine ou de l'émergence de variants capables échappement immunitaire. Le variant de type sauvage (TS) qui a émergé à la fin de 2019 avait un nombre de reproduction de base (R0) d'environ deux dans les pays à revenu élevé (i.e. en moyenne, chaque personne infectée infectera deux personnes dans une population sans immunité et où il n'y a pas de mesures de santé publique [SP] mises en place). En cas de R0 d'environ deux, et sans vaccins, plus de 50 % de la population doit contracter l'infection et être immunisée avant que la pandémie ne commence à être maîtrisée et environ 75 % de la population a contracté l'infection au moment où la pandémie prend finNote de bas de page 1. En raison de la virulence relativement élevée du SRAS‑CoV‑2 — un taux de mortalité par infection approchant 1 % et un taux d'infection et hospitalisation approchant 10 % (voir la section sur les mesures de santé publique) et un manque de traitements et de vaccins efficaces — les conséquences pour les Canadiens et le système de santé canadien de la propagation sans restriction du SRAS‑CoV‑2 en 2020 ont été désastreuses (tableau 1)Note de bas de page 1. Une telle situation et ses conséquences ont été observées en Italie au début de 2020Note de bas de page 2. Dans le présent article, l'éclosion de la maladie à coronavirus 2019 (COVID‑19) qui s'est produite au Canada, affectée par les mesures de santé publique et la vaccination, est décrite et comparée aux résultats obtenus dans des pays semblables (la première section de l'étude), puis comparée aux résultats possibles au Canada à l'aide de la modélisation de scénarios contrefactuels pour différents niveaux de vaccination et de mesures de SP que ceux réellement mis en œuvre (la deuxième section de l'étude).

Tableau 1 : Nombre total contrefactuel de cas prévus, d'hospitalisations et de décès dus à la maladie à coronavirus 2019 obtenus à partir de la modélisation, comparativement aux nombres observés
Conséquence Contrefactuel sans mesures de santé publique ou de vaccins Observé en date du 24 avril 2022, avec des mesures de santé publique et des vaccins
Cas Jusqu'à 34 millionsTableau 1 Note de bas de page a 3,3 millionsTableau 1 Note de bas de page a
Hospitalisations Jusqu'à 2 millions 150 602
Décès Jusqu'à 800 000 38 783

Description de l'évolution de l'éclosion, des mesures de santé publique et des données probantes

Connaissance évolutive de l'épidémiologie du coronavirus du syndrome respiratoire aigu sévère 2

Les principales variables épidémiologiques pour la planification et la modélisation comprennent des estimations de la vitesse de transmission (en particulier le R0) et de la gravité des infections comme un cas ou une 'infection entraînant une hospitalisation et les taux de mortalité. Depuis le début de mars 2020, l'Agence de la santé publique du Canada (l'Agence) effectue des recherches documentaires quotidiennes afin d'obtenir les estimations les plus récentes de ces valeurs. Au départ, des estimations de R0 (environ 2‑3) et des taux d'hospitalisation et de mortalité (10 % et 1,2 %, respectivement) ont été obtenues à partir d'études réalisées en ChineNote de bas de page 3. Étant donné que la transmission varie selon le taux de contact entre les personnesNote de bas de page 4, les valeurs de R0 varient selon le pays ou la région où elles sont mesuréesNote de bas de page 5. Les taux globaux de mortalité dépendent également de la démographie du pays étudié, en raison des taux de mortalité variables en fonction de l'âgeNote de bas de page 6. Les valeurs estimées des principales variables épidémiologiques variaient au fil du temps. Par exemple, il est devenu évident que jusqu'à 30 % des infections sont asymptomatiques et qu'il est peu probable qu'elles soient détectées efficacement au moyen des systèmes de surveillanceNote de bas de page 7. De plus, des variants sont apparus qui étaient de plus en plus transmissibles (TS < Alpha < Delta < Omicron : le R0 est passé de 2–3, à 3,5, à 5–7, puis à environ 10)Note de bas de page 8. À l'exception du variant OmicronNote de bas de page 9, ces variants étaient également plus virulents que les souches originales du TSFootnote 10Footnote 11.

Mesures de santé publique pour lutter contre la maladie à coronavirus 2019

La planification canadienne en cas de pandémie, axée sur un virus de la grippe pandémique comme étant la cause la plus probable de son apparition, comprendrait le traitement des personnes gravement touchées au moyen d'antiviraux jusqu'à ce que l'industrie des vaccins élabore un vaccin modifié contre la grippe pour contrôler l'infection, comme cela s'est produit pendant la pandémie de grippe H1N1Note de bas de page 12. En mars 2020, le Canada a été confronté à un agent pathogène hautement transmissible et virulent (taux de mortalité par infection [TMI] d'environ 1 % comparativement à 0,04 % pour la grippe saisonnière) pour lequel il n'y avait pas d'immunité naturelle, aucun vaccin (ou possibilité immédiate d'un vaccin) et aucun médicament antiviral efficace. Par conséquent, en mars 2020 et jusqu'à ce que les vaccins soient mis au point, les seules interventions disponibles étaient les interventions non pharmaceutiques (INP ou les mesures de SP) qui empêchent la transmission dans la population, soit 1) en réduisant la fréquence des contacts entre les personnes infectées et non infectées, ou 2) en réduisant réduire la probabilité que la transmission se produise lorsque les personnes infectées entrent en contact (directement ou indirectement) avec des personnes non infectées. Les mesures de « réduction des contacts » sont celles qui ciblent les personnes connues comme étant infectées, ou plus susceptibles d'être infectées (tests pour détecter et ensuite isoler les cas, dépistage des contacts et quarantaine des contacts)Note de bas de page 13 et les fermetures restrictives qui visent à réduire les contacts plus largement dans la population, notamment la fermeture d'écoles, des entreprises « non essentielles » et les lieux de loisirs et récréatifs, le télétravail, les restrictions sur les rassemblements religieux et privés, et les couvre‑feux, etc.Note de bas de page 14. Les mesures de « réduction de la probabilité de transmission » sont des mesures personnelles telles que la distanciation, le lavage des mains, les écrans protecteurs et des masques qui limitent la propagation des gouttelettesNote de bas de page 14Note de bas de page 15 et les améliorations de la ventilation qui réduisent la densité des virions en aérosolNote de bas de page 16. De plus, des restrictions en matière de déplacements internationaux et nationaux ont été utilisées pour limiter l'introduction de l'infection dans différents lieux (e.g. les territoires canadiens et les provinces de l'Atlantique) où elle n'avait pas encore été répandue ou dont la prévalence était faible et ralentir le taux d'introduction de l'infection dans la population en général. Dans le présent article, l'utilisation de ces INP fait l'objet d'un suivi au fil du temps à l'aide d'un indice de sévérité des mesures de santé publique , qui est une combinaison semi‑quantitative de renseignements provenant de neuf interventions différentes en matière de SP (fermeture d'école, fermeture du lieu de travail, annulation d'événements publics, restrictions sur la taille des rassemblements, fermeture des transports publics, exigences de séjour à la maison, restrictions sur les déplacements internes, restrictions sur les voyages internationaux et campagnes d'information du public) obtenues au moyen du « Government Response Tracker »Note de bas de page 17.

Contre‑mesures médicales — traitements et vaccins

Selon l'examen de l'Organisation panaméricaine de la santé (OPS) sur les options thérapeutiques contre la COVID‑19, des centaines d'options thérapeutiques sont évaluées au moyen de plus de 10 000 étudesNote de bas de page 18. De ces options, à ce jour, six ont été approuvées au CanadaNote de bas de page 19. Il s'agit notamment d'anticorps monoclonaux qui visent à empêcher le virus SRAS‑CoV‑2 d'infecter des cellules saines. Au Canada, quatre traitements aux anticorps monoclonaux des protéines de spicule anti‑SRAS‑CoV‑2 ont été approuvés. Trois traitements aux anticorps monoclonaux ont été approuvés pour un traitement chez les personnes présentant un risque plus élevé d'être hospitalisées ou de mourir en raison de la COVID‑19, en raison de leur âge ou de leurs problèmes de santé : le casirivimab et l'imdevimab, le bamlanivimab et le sotrovimab. De plus, la combinaison cilgavima/tixagevimab (EvusholdMC) est approuvée pour la prévention de la COVID‑19 chez les personnes ayant un système immunitaire faible ou chez celles pour qui la vaccination n'est pas recommandée. Certains de ces médicaments pourraient perdre leur efficacité contre le variant Omicron (ou des sous‑lignées particulières) en raison de mutations multiples dans la protéine de spiculeNote de bas de page 20Note de bas de page 21. Deux médicaments antiviraux, le nirmatrelvir/ritonavir (PaxlovidMC) et le remdésivir (Veklury®), qui empêchent la réplication du virus, ont été approuvés au Canada. L'utilisation de ces antiviraux est limitée en raison d'une combinaison de problèmes concernant l'efficacité, les interactions avec d'autres produits pharmaceutiques et les limites selon lesquelles les patients atteints de COVID‑19 devraient les recevoir ainsi que le moment où ils devraient les recevoir. La mise au point de vaccins a été une réussite beaucoup plus importante; les vaccins à ARNm ont été très efficaces contre l'infection et les conséquences graves pour le TS et les variants Alpha et DeltaNote de bas de page 22Note de bas de page 23Note de bas de page 24. La diminution de l'immunité contre l'infection est devenue évidente au cours des quelques mois qui ont suivi la vaccination (même si elle est moindre au Canada, où la plupart des personnes ont reçu deux doses initiales à un intervalle prolongé de trois mois)Note de bas de page 25Note de bas de page 26. Il y aurait également une certaine diminution de l'immunité contre les conséquences graves, mais cela semble très lent et se produire dans une moindre mesure et une troisième dose de vaccin offre une protection plus élevée et plus soutenueNote de bas de page 9Note de bas de page 24Note de bas de page 26Note de bas de page 27. L'émergence du variant Omicron a modifié le paysage du rôle des vaccins comme moyen de contrôler l'éclosion en raison de sa capacité à échapper de manière importante à l'immunité contre les infections induites par le vaccin, avec l'efficacité de deux doses contre les infections diminuant d'environ 90 % pour le variant préoccupant (VP) Delta à 30 % ou moins pour le variant OmicronNote de bas de page 24Note de bas de page 26. Les vaccins continuent de protéger contre les conséquences graves des infections avec tous les variants, y compris Omicron, particulièrement après l'administration d'une troisième doseNote de bas de page 24Note de bas de page 26.

Chronologie de l'éclosion et des mesures de santé publique au Canada

En l'absence de vaccins, deux stratégies de contrôle possibles ont été envisagées : 1) l'éradication et la prévention des importations, souvent appelée la stratégie zéro COVID (voir la section sur la gestion alternative de l'épidémie), largement réalisée par les provinces de l'Atlantique et les territoires pour la plus grande partie de la pandémie ou 2) la suppression de la transmission de sorte que la capacité de soins de santé ne soit pas dépassée (la stratégie appliquée dans les grandes provinces pour la plus grande partie de la pandémie). Après avoir observé les répercussions graves de la transmission initiale non restreinte du SRAS‑CoV‑2 en Italie, lorsque la transmission à l'intérieur du Canada a été reconnue et que la première vague est devenue évidente, une période initiale de fermetures restrictives a été encouragée pour mettre fin à l'éclosion, améliorer la surveillance et permettre l'affectation et la mise en œuvre d'autres INP (figure 1). Au fur et à mesure que les cas sous surveillance commençaient à diminuer, des études de modélisation ont été effectuées pour estimer les proportions de cas détectés et isolés et de contacts retracés et mis en quarantaine qui étaient nécessaires pour contrôler la transmission si les restrictions devaient être levéesNote de bas de page 13Note de bas de page 28Note de bas de page 29. Après la levée des restrictions au début de l'été 2020, la transmission dans les grandes provinces a repris, ce qui indique que la capacité de dépistage et de suivi n'était pas suffisante pour contrôler l'éclosion et, éventuellement, des restrictions ont été réintroduites pour protéger la capacité des soins de santéNote de bas de page 30 (figure 1). Tout au long de la pandémie, ce cycle de levée des restrictions, suivi d'une résurgence de l'éclosion puis suivie d'une réintroduction des restrictions a été une caractéristique du contrôle dans les grandes provinces (figure 1). L'effet de la levée des restrictions sur la transmission a été exacerbé par l'invasion et la propagation de variants préoccupants (VP) plus transmissibles; le VP Alpha qui a émergé au cours de la troisième vague au printemps 2021 et le VP Delta qui a émergé au cours de la quatrième vague à la fin de l'été et à l'automne 2021. Alors que la vaccination a été lancée en 2021, on espérait que les restrictions pourraient être levées de façon permanente et de nombreuses provinces ont prévu de le faire lorsque les pourcentages ciblés de couverture vaccinale de la population seraient atteints. Cependant, l'émergence des variants Alpha et Delta plus transmissibles a fait en sorte qu'il fallait vacciner des pourcentages plus élevés de la population pour que les restrictions soient levées. Par conséquent, la réintroduction de restrictions était nécessaire pour contrôler les vagues causées par les variants Alpha et Delta. Plus récemment, le variant Omicron a envahi le Canada et s'y est répandu à la fin de 2021 et au début de 2022. Ce variant avait des caractéristiques de virulence inférieure, mais était capable d'échappement immunitaire. Ces caractéristiques étaient attendues du point de vue évolutionnaireNote de bas de page 31; cette dernière limitant la capacité des vaccins à contrôler la transmission. La combinaison d'une forte transmissibilité et d'une efficacité relativement faible de deux doses de vaccin pour prévenir la transmission de ce variant signifie que, malgré une virulence réduite, la capacité des soins de santé a été mise à l'épreuve de nouveau et des restrictions ont dû être réintroduites. Il est probable que ce variant a infecté une proportion élevée de la population canadienne. Dans une étude par questionnaire, un Canadien sur cinq a déclaré une infection par la COVID‑19 dans son ménage depuis le 1er décembre 2021Note de bas de page 32, tandis que chez les donneurs de sang, la séropositivité due à l'infection est passée de 6,4 % en décembre 2021 à 23,7 % à la mi‑février 2022Note de bas de page 33. Ce taux d'infection sans précédent pendant la vague causée par le variant Omicron, combiné au pourcentage élevé de la population ayant reçu deux doses de vaccin ou plus (tableau 2), a porté l'immunité de la population canadienne à des niveaux qui, au moment de la rédaction du présent rapport, sont susceptibles de signifier que les restrictions peuvent être levées à long terme au Canada (et dans de nombreux pays dans le monde), à condition qu'un autre VP, capable d'échappement immunitaire et virulent, n'apparaisse. L'introduction de vaccins a permis que l'immunité post‑vaccination, plutôt que simplement l'immunité post‑infection, permette la levée des mesures de SP, alors qu'avant d'atteindre des niveaux suffisants d'immunité, les mesures restrictives de SP ont permis de maîtriser l'éclosion et, ensemble, cette approche a limité les conséquences graves et les décès (tableau 1). Dans l'ensemble, les comparaisons entre les décès au Canada et ceux dans d'autres pays à revenu élevé (figure 2), sélectionnés parce que leurs niveaux de mesures de santé publique rigoureuses et de l'adoption des vaccins étaient quelque peu différents de ceux du Canada (tableau 2), illustrent l'efficacité relative de la réponse canadienne.

Figure 1 : Chronologie de l'éclosion de la maladie à coronavirus 2019 et des interventions en santé publique au Canada jusqu'au 1er avril 2022Figure 1 Note de bas de page a

Figure 1

Text description: Figure 1

La figure comporte deux graphiques. Le premier présente le nombre de cas de COVID‑19 (par 100 000 habitants) déclarés quotidiennement au Canada pour la période allant du 29 janvier 2020 au 1er avril 2022. Le deuxième présente l’indice de sévérité des mesures de santé publique au Canada au cours de la même période. Les graphiques des cas présentent les cinq principales vagues nationales de COVID‑19 au cours de cette période. Dans le haut de la figure, trois périodes sont indiquées : la période allant jusqu’en janvier 2021, avant que les vaccins ne soient disponibles pour la majorité de la population, la période allant de janvier à juin 2021, période au cours de laquelle l’administration de la vaccination a augmenté et la période postérieure à juin 2021, période pendant laquelle une proportion élevée de la population avait été vaccinée. La première vague a atteint un pic en mars 2020 (cinq cas par 100 000 habitants), la deuxième vague en janvier 2021 (23 cas par 100 000 habitants), la troisième vague en avril 2021 (23 cas par 100 000 habitants), la quatrième vague en septembre 2021 (13 cas par 100 000 habitants) et la cinquième vague en janvier 2022 (108 cas par 100 000 habitants). Le graphique de l’indice de sévérité des mesures de santé publique passe de 2,8 en janvier 2020 à 76 en avril 2020, puis fluctue entre 62 et 78, augmentant en réponse aux vagues de cas. Les flèches et le texte de la figure décrivent le lien entre les vagues et l’indice de sévérité des mesures de santé publique comme suit. La première vague, qui était causée par le début de la transmission endémique de la COVID‑19 au Canada, a été maîtrisée par une sévérité croissante des mesures de santé publique. La deuxième vague est survenue en raison de l’assouplissement des mesures de santé publique, et elle a été maîtrisée au moyen d’un niveau de sévérité croissant des mesures de santé publique. La troisième vague s’est à nouveau produite en raison d’une réduction du niveau de sévérité des mesures de santé publique, en plus de la transmission du variant préoccupant Alpha, et elle a été maîtrisée par une combinaison d’augmentation de la sévérité des mesures de santé publique et de la couverture vaccinale de la population. La quatrième vague s’est produite en raison d’une réduction de la sévérité des mesures de santé publique, également aidée par la transmission du variant préoccupant Delta et elle a été maîtrisée par une combinaison d’augmentation de la sévérité des mesures de santé publique et de la vaccination de la population. La cinquième vague s’est produite en raison d’une réduction de la sévérité des mesures de santé publique et la transmission du variant préoccupant Omicron, et elle a été maîtrisée par une combinaison d’augmentation de la sévérité des mesures de santé publique, de la vaccination de la population et de l’immunité suivant l’infection.


Tableau 2 : Nombres cumulatifs, au 20 avril 2022, des décès signalés dus à la maladie à coronavirus 2019 par 100 000 habitants dans les pays qui ont adopté ou non une approche zéro COVID pour la gestion de la pandémieTableau 2 Note de bas de page a
Pays Décès cumulatifs par 100 000 habitants Pourcentage de la population vaccinée avec deux doses
N'a pas adopté une approche zéro COVIDTableau 2 Note de bas de page b
Canada 101,3 82 %
Danemark 103,7 82 %
Allemagne 159,3 77 %
Suède 183,1 75 %
France 214,6 78 %
Royaume-Uni 259,8 73 %
Belgique 268,7 79 %
États-Unis 291,9 66 %
A adopté une approche zéro COVID
Nouvelle-Zélande 11,7 80 %
Singapour 24,2 90 %
Australie 26,7 83 %
Corée du Sud 42,2 87 %

Figure 2 : Comparaison des décès quotidiens signalés par 100 000 habitants et de la sévérité des mesures de santé publique au Canada et dans d'autres pays à revenu élevéFigure 2 Note de bas de page a

Figure 2

Description textuelle : Figure 2

La figure comporte cinq sous‑figures distinctes pour les données provenant du Canada, de l’Allemagne, de la Suède, du Royaume‑Uni et des États‑Unis, chacune comportant deux graphiques. Le premier graphique de chaque sous‑figure présente le nombre de décès déclarés dus à la COVID‑19 (par 100 000 habitants) pour la période allant du 2 février 2020 au 1er avril 2022 et le deuxième présente l’indice de sévérité des mesures de santé publique dans ce pays au cours de la même période. Les graphiques des décès présentent les décès associés aux cinq principales vagues de COVID‑19 au cours de cette période et sont globalement similaires à ceux décrits à la Figure 1. Par contre, il y a de grandes différences dans le nombre des décès entre les pays qui sont représentées par les valeurs maximales de décès par 100 000 habitants. La Suède a connu la valeur maximale de décès la plus élevé (4,7 décès par 100 000 habitants), suivi du Royaume‑Uni (2,7 décès par 100 000 habitants), de l’Allemagne (1,5 décès par 100 000 habitants) et des États‑Unis (1,3 décès par 100 000 habitants), la plus faible valeur étant au Canada (0,7 décès par 100 000 habitants). Pour chaque pays, l’indice de sévérité est passée de près de zéro en février 2020 à des valeurs élevées en avril 2020, suivi d’une fluctuation selon la réponse de chacun des pays à l’augmentation de cas au cours des vagues. En Allemagne, l’indice de sévérité des mesures de contrôle était similaire à celui du Canada au début de la pandémie, suivi d’une baisse à des niveaux inférieurs (à 49) à partir de mai 2020. Il a ensuite augmenté à des niveaux supérieurs à ceux du Canada (à 83) en réponse à la deuxième vague, puis il a fluctué comme au Canada, mais à des niveaux inférieurs. Pour la Suède, les fluctuations de l’indice de sévérité étaient similaires à celles de l’Allemagne, mais à des niveaux inférieurs (maximum 69 et minimum 19 à l’été 2021). Au Royaume‑Unis, l’indice de sévérité était similaire à celle de l’Allemagne en termes d’ampleur et de fluctuations jusqu’en février 2021, suivi d’une baisse à 41. L’indice a par la suite demeuré à un niveau inférieur à 48 pour la période restante. Aux États‑Unis, l’indice de sévérité était semblable à celle du Canada jusqu’en décembre 2020, suivi d’un déclin et une fluctuation légère autour d’une valeur de 56 en 2021.


Gestion alternative de l'éclosion

Au début de la pandémie, certains ont laissé entendre que la COVID‑19 pourrait ne pas être plus grave que la grippe saisonnière. Toutefois, dans les pays à revenu élevé comme le Canada, où les populations sont souvent relativement plus âgées, le TMI pour la COVID‑19 chez les personnes non immunisées est d'environ 1 %Note de bas de page 10Note de bas de page 11Note de bas de page 35, tandis que pour la grippe saisonnière aux États‑Unis, le taux de mortalité par cas est d'environ 0,1 %Note de bas de page 36 avec un TMI d'environ 0,04 % comptant pour environ 70 % des cas d'influenza qui sont asymptomatiquesNote de bas de page 37. Malgré cela, certains défenseurs ont proposé que la gestion de la pandémie comme celle qui s'est produite en Suède, où la gestion s'est d'abord appuyée sur des efforts volontaires du public plutôt que sur des restrictions obligatoires, aurait été préférable. En fait, le Canada a connu un faible taux de mortalité comparativement à d'autres pays à revenu élevé et un taux d'environ la moitié de celui déclaré en Suède (figure 2; tableau 2). Des études contrefactuelles suggèrent que l'application de l'approche adoptée en Suède à des pays comme le Royaume‑Uni et le Danemark aurait entraîné environ le double du nombre de décès observés dans ces paysNote de bas de page 38. Au début de la pandémie, certaines estimations précoces et faibles des taux de mortalité propres à la COVID‑19 en Amérique du Nord, en particulier pour les plus jeunes, combinées aux préoccupations des conséquences imprévues sur la santé mentale et physique des fermetures restrictives, ont mené à l'idée d'appliquer des restrictions (« blindage ») uniquement aux groupes d'âge plus vulnérables, permettant aux personnes plus jeunes de vivre une vie plus normaleNote de bas de page 39. Toutefois, il est devenu évident que cette approche nécessiterait l'élargissement de la protection aux groupes d'âge beaucoup plus jeunes (45 ans et plus), ce qui serait irréalisable et continuerait d'entraîner des conséquences graves avec des taux de mortalité élevés dans tous les groupes d'âgeNote de bas de page 40.

Certains pays (e.g. l'Australie, la Nouvelle‑Zélande, Singapour) ainsi que les provinces de l'Atlantique et les territoires du Canada ont mis en œuvre une stratégie de zéro COVID, plus tôt au cours de la pandémie. L'objectif de la stratégie est d'arrêter complètement la transmission en utilisant agressivement des mesures de SP telles que le dépistage de masse, le retraçage des contacts, les mesures à la frontière et, le cas échéant, les confinements, afin d'éliminer les nouvelles infections et de permettre un retour aux activités économiques et sociales normales. Les administrations et les pays qui ont adopté cette approche étaient, pour la plupart, ceux qui avaient une propagation limitée du SRAS‑CoV‑2 lorsque les mesures ont commencé et qui avaient des possibilités (e.g. pour les États insulaires d'Australie et de Nouvelle‑Zélande) de contrôler plus facilement les cas importés. Lorsque le variant Omicron est apparu, la plupart de ces pays ont connu des éclosions importantes et ont maintenant abandonné cette approche. Toutefois, cette approche a permis aux niveaux de couverture vaccinale de leurs populations d'atteindre des niveaux élevés avant qu'une transmission importante ne se produise, limitant ainsi le fardeau sur le système de santé et le nombre de décès qui se sont produits (tableau 2).

Modélisation contrefactuelle

Méthodes

Une étude de modélisation est présentée pour illustrer l'importance des mesures de SP et de la vaccination pour limiter les conséquences graves et les décès causés par la COVID‑19 au Canada. L'étude a utilisé un modèle basé sur les agents et représentatif de 100 000 personnes provenant de la population canadienneNote de bas de page 28Note de bas de page 41. Le modèle a été modifié pour simuler l'éclosion au Canada jusqu'à la rédaction du présent rapport (avril 2022). Le modèle comprenait une simulation de la mise en œuvre et de la levée des mesures de SP utilisées (figure 1), le déploiement de la vaccination (première, deuxième et troisième doses par groupes d'âge et groupes prioritaires), l'invasion des variants Alpha, Delta et Omicron BA.1, l'efficacité du vaccin contre les infections et les conséquences graves propres à chaque variant, la protection contre les réinfections d'un même variant ou d'un variant différent et la diminution de l'immunité après la vaccination et l'infection naturelle. De nombreuses valeurs de paramètres ont été obtenues à partir de la littérature existante, mais certaines ont été obtenues en ajustant le modèle aux données de surveillance et d'hospitalisation (des renseignements complets sont fournis dans les documents supplémentaires). Il y avait huit scénarios, y compris le scénario de référence (S1), dans lesquels une approximation de la mise en œuvre ou la levée effective des mesures de SP (y compris une levée finale complète en mars 2022) et la vaccination de la population ont été modélisées; puis sept scénarios contrefactuels : 1) S2 : un scénario du pire cas dans lequel aucune mesure de SP ni aucun vaccin n'ont été mis en œuvre; 2) S3 : un scénario dans lequel les mesures de SP ont été mises en œuvre, mais où il n'y avait pas de vaccination; 3) S4 : un scénario où il n'y avait pas de mesure de SP, mais où les vaccins ont été administrés comme observé et quatre scénarios dans lesquels les vaccins ont été administrés de la façon observée et les mesures de SP ont également été mises en œuvre comme observé, mais elles ont été levées tôt au 4) S5 : le 1er juillet 2020 (après la première vague); 5) S6 : le 1er mars 2021 (après la deuxième vague); 6) S7 : le 1er juillet 2021 (après la troisième vague, une combinaison du TS et du variant Alpha) et 7) S8 : le 1er novembre 2021 (après la quatrième vague, variant Delta).

Résultats

Les simulations montrent que la combinaison des mesures de SP et des vaccinations qui ont eu lieu au Canada a entraîné beaucoup moins d'infections, d'hospitalisations et de décès que dans les scénarios contrefactuels où d'autres décisions ont été prises sur le déploiement des vaccins et la mise en œuvre de mesures de SP (figure 3 et figure 4; tableau 3). En l'absence de mesures de SP et de vaccinations (S2), une vague initiale très importante dépassait de loin la capacité hospitalière, tout comme une vague subséquente principalement causée par le variant Delta lorsque l'immunité diminuait, ce qui a entraîné un très grand nombre d'hospitalisations et de décès (tableau 1). En l'absence de vaccination, mais avec le maintien des mesures de SP (S3), une vague très importante du variant Delta s'est produite. En l'absence de mesures de SP, mais avec la vaccination en place (S4), scénario semblable au S2, une vague initiale très importante d'hospitalisation aurait été observée, mais le déploiement de la vaccination aurait empêché qu'une vague subséquente causée principalement par le variant Delta ne se produise. La levée précoce des mesures de SP (S5 au S8) a entraîné la résurgence de l'éclosion à divers moments, correspondant au moment de la levée, avec une capacité de soins de santé dépassée. Plus tôt les premières mesures ont été levées, pires les conséquences ont été en termes d'hospitalisations et de décès. La levée des mesures après la deuxième vague (S6) a coïncidé avec l'introduction de la souche Alpha plus transmissible et virulente, causant davantage d'hospitalisations et de décès que la levée des mesures précoce après la première vague lorsque la souche de TS était dominante (S5), alors que la levée des mesures après la troisième vague (S7) a causé moins d'hospitalisations et de décès malgré une souche Delta plus virulente en circulation en raison d'une couverture vaccinale plus élevée. Puisque le variant Omicron est moins virulent que toutes les autres souches qui ont émergé au Canada, une levée des mesures après la quatrième vague (S8) aurait causé un nombre élevé d'infections, mais un nombre considérablement plus faible d'hospitalisations comparativement aux autres scénarios contrefactuels (figure 3 et figure 4). Le scénario de référence (S1), modélisé à partir d'une approximation de la couverture vaccinale et les mesures réelles de SP au Canada, était le seul scénario où les hospitalisations étaient systématiquement inférieures au seuil de lits d'hôpital.

Figure 3 : Nombre d'infections symptomatiques estimées pour sept scénarios contrefactuels avec des combinaisons de mesures de santé publique et de vaccinations différentes de celles du scénario de référence observéFigure 3 Note de bas de page a

Figure 3

Description textuelle : Figure 3

Cette figure présente huit graphiques, représentant le nombre quotidien de nouveaux cas symptomatiques de COVID‑19 (par 100 000 habitants) pour la période allant de février 2020 à la fin mars 2022 obtenus au cours des simulations de modèles. Chaque graphique comprend une courbe et une région avoisinante ombragée (représentant respectivement la médiane et le 95e centile des cas de COVID‑19 dans 100 simulations de modèles) pour chacun des huit scénarios avec différentes applications des mesures de vaccination et de santé publique (SP) pour contrôler l’éclosion. Dans les graphiques, une ligne verticale pointillée indique le moment de la levée de toutes les mesures de SP et la coloration des zones ombragées des graphiques indique le variant de SRAS‑CoV‑2 au moment des vagues de COVID‑19 (type sauvage [TS] = vert, Alpha = ocre, Delta = bleu et Omicron = rose). Voici ces huit scénarios :

  • S1 : le niveau de référence (première rangée du graphique de gauche), dans laquelle la mise en œuvre et la levée des mesures de SP (y compris une levée finale complète en mars 2022) et la vaccination de la population ont été modélisées tel qu’observé. Les cas dans toutes les vagues étaient faibles avec une incidence < 250 cas/100 000 habitants.
  • S2 : un scénario du pire des cas où aucune mesure de SP ou aucune vaccination n’a été mise en œuvre (deuxième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à des vagues importantes au printemps 2020 (cas de TS approchant les 1 000 cas par 100 000 habitants), à l’automne 2021 (pic de 500 cas du variant Delta par 100 000 habitants) et en janvier 2022 (pic de 300 cas du variant Omicron par 100 000 habitants).
  • S3 : un scénario au cours duquel les mesures de SP ont été mises en œuvre, mais où il n’y a pas eu de vaccination (troisième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à une vague importante du variant Delta à la fin de l’été tôt ou à l’automne (pic de 500 cas par 100 000 habitants) et à une vague du variant Omicron moins importante en janvier 2022 (pic de sept cas par 100 000 habitants).
  • S4 : un scénario au cours duquel il n’y avait aucune mesure de SP, mais les vaccins ont été administrés tel qu’observé (quatrième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à une vague importante causé par le TS au printemps 2020 (un pic approchant 1 000 cas par 100 000 habitants) et à une vague importante du variant Omicron en janvier 2022 (un pic approchant les 700 cas par 100 000 habitants); ainsi que quatre scénarios au cours desquels les vaccins ont été administrés tel qu’observé et les mesures de SP ont également été mises en œuvre tel qu’observé, mais ont été levées plus tôt.
  • S5 : le 1er juillet 2020 (après la première vague; première rangée du graphique de droite).
  • S6 : le 1er mars 2021 (après la deuxième vague; deuxième rangée du graphique de droite).
  • S7 : le 1er juillet 2021 (après la troisième vague causée par une combinaison du TS et du variant Alpha; troisième rangée du graphique de droite).
  • S8 : le 1er novembre 2021 (après la quatrième vague causée par le variant Delta; quatrième rangée du graphique de droite).

Dans ces scénarios, des vagues se sont produites après la levée des mesures et, dans certains cas, à des périodes ultérieures. Dans le scénario S5, une vague importante causé par le TS (un pic approchant les 500 cas par 100 000 habitants) a eu lieu à l’automne/hiver 2020‑2021 et une deuxième vague d’Omicron d’une importance similaire a eu lieu en janvier 2022. Dans le scénario S6, il y a eu une vague printanière/estivale de cas combinés du TS et du variant Alpha (pic de 700 cas par 100 000 habitants) et une vague d’Omicron en janvier 2022 (pic de 400 cas par 100 000 habitants). Dans le scénario S7, il y a eu une vague modérée du variant Delta à l’automne 2022 (pic de 200 cas par 100 000 habitants) et une vague d’Omicron en janvier 2022 (pic de 1 000 cas par 100 000 habitants). Dans le scénario S8, il y a eu une vague importante du variant Omicron en janvier 2022 (pic de 1 000 cas par 100 000 habitants).


Figure 4 : Nombre ces cas hospitalisés estimés pour sept scénarios contrefactuels avec des combinaisons de mesures de santé publique et de vaccinations différentes de celles du scénario de référence observéFigure 4 Note de bas de page a

Figure 4

Description textuelle : Figure 4

Cette figure présente huit graphiques, représentant les nombres quotidiens des hospitalisations causées par la COVID‑19 (par 100 000 habitants) pour la période allant de février 2020 à la fin mars 2022 obtenus au cours des simulations de modèles. Chaque graphique comprend une courbe et une région avoisinante ombragée (représentant respectivement la médiane et le 95e centile des hospitalisations causées par la COVID‑19 dans 100 simulations de modèles) pour chacun des huit scénarios avec différentes applications des mesures de vaccination et de santé publique (SP) pour contrôler l’éclosion. Dans les graphiques, une ligne verticale pointillée indique le moment de la levée de toutes les mesures de SP, une ligne rouge horizontale pointillée présente la capacité hospitalière moyenne estimée pour les cas de COVID‑19 au Canada (30 cas par 100 000 habitants) et la coloration des zones ombragées des graphiques indique le variant de SRAS‑CoV‑2 au moment des vagues de COVID‑19 (type sauvage [TS] = vert, Alpha = ocre, Delta = bleu et Omicron = rose). Voici ces huit scénarios :

  • S1 : le niveau de référence (première rangée du graphique de gauche), dans laquelle la mise en œuvre et la levée des mesures de SP (y compris une levée finale complète en mars 2022) et la vaccination de la population ont été modélisées tel qu’observé. Les hospitalisations au cours de toutes les vagues étaient faibles avec une prévalence inférieure à la capacité canadienne.
  • S2 : un scénario du pire des cas où aucune mesure de SP ou aucune vaccination n’a été mise en œuvre (deuxième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à des vagues importantes au printemps 2020 (hospitalisations causées par le TS approchant les 500 hospitalisations par 100 000 habitants), à l’automne 2021 (pic de 700 hospitalisations causées par le variant Delta par 100 000 habitants) ainsi qu’en janvier 2022 avec des hospitalisations causées par le variant Omicron.
  • S3 : un scénario au cours duquel les mesures de SP ont été mises en œuvre, mais où il n’y a pas eu de vaccination (troisième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à une vague importante du variant Delta à la fin de l’été ou au début de l’automne (pic de 700 hospitalisations par 100 000 habitants) s’étendant jusqu’en janvier 2022 avec des hospitalisations causées par le variant Omicron.
  • S4 : un scénario au cours duquel il n’y avait aucune mesure de SP, mais les vaccins ont été administrés tel qu’observé (quatrième rangée du graphique de gauche), ce qui a donné lieu à une vague importante causé par le TS au printemps 2020 (un pic approchant 500 hospitalisations par 100 000 habitants) et à une petite vague causée par le variant Omicron en janvier 2022 (un pic en dessous de la limite de la capacité hospitalière); ainsi que quatre scénarios au cours desquels les vaccins ont été administrés tel qu’observé et les mesures de SP ont également été mises en œuvre tel qu’observé, mais ont été levées plus tôt.
  • S5 : le 1er juillet 2020 (après la première vague; première rangée du graphique de droite).
  • S6 : le 1er mars 2021 (après la deuxième vague; deuxième rangée du graphique de droite).
  • S7 : le 1er juillet 2021 (après la troisième vague causée par une combinaison du TS et du variant Alpha; troisième rangée du graphique de droite).
  • S8 : le 1er novembre 2021 (après la quatrième vague causée par le variant Delta; quatrième rangée du graphique de droite).

Dans ces scénarios, des vagues se sont produites après la levée des mesures et, dans certains cas, à des périodes ultérieures. Dans le scénario S5, une vague importante causée par le TS (un pic approchant les 200 hospitalisations par 100 000 habitants) a eu lieu à l’automne/hiver 2020–2021 et une petite vague causée par le variant Omicron qui s’est située dans la limite de la capacité hospitalière a eu lieu en janvier 2022. Dans le scénario S6, il y a eu une vague printanière/estivale d’hospitalisations causées par une combinaison du TS et du variant Alpha (pic de 300 cas par 100 000 habitants) et une petite vague causée par le variant Omicron en dessous de la limite de la capacité hospitalière en janvier 2022. Dans le scénario S7, il y a eu une vague modérée du variant Delta à l’automne 2022 (pic de 80 hospitalisations par 100 000 habitants) qui s’est poursuivi jusqu’en janvier 2022. Dans le scénario S8, il y a eu une vague modérée causée par le variant Omicron en janvier 2022, avec un pic d’hospitalisations dépassant la capacité de façon transitoire.


Tableau 3 : Principales mesures (valeurs médianes et les valeurs du 95e centile pour 100 mises en œuvre des modèles) des casTableau 3 Note de bas de page a, des hospitalisations et des décès estimés par les simulations de modèles basés sur les agents pour le niveau de référence observé et sept scénarios contrefactuels pour la période allant du 7 février 2020 au 31 mars 2022
Méthodes de contrôle de la transmission dans les scénarios et les extrants de la modélisation Scénarios contrefactuels
S1
Observation au niveau de référence
S2
Aucune mesure de SP ou vaccination
S3
Aucune vaccination
(mesures de SP maintenues)
S4
Aucune mesure de SP
(vaccination maintenue)
S5
Aucune mesure de SP après le 1er juillet 2020
 (vaccination maintenue)
S6
Aucune mesure de SP après le 1er mars 2021
(vaccination maintenue)
S7
Aucune mesure de SP après le 1er juillet 2021
(vaccination maintenue)
S8
Aucune mesure de SP après le 1er novembre 2021
(vaccination maintenue)
Déploiement de la vaccination Oui Non Non Oui Oui Oui Oui Oui
Levée des mesures de SP 31 mars 2022 Aucune mesure de SP 31 mars 2022 Aucune mesure de SP 1er juillet 2020 1er mars 2021 1er juillet 2021 1er novembre 2021
Cas cliniques par 100 000Tableau 3 Note de bas de page b habitants 12 001
(10 028–15 306)
90 154
(89 299–91 277)
38 858
(29 438–43 633)
59 574
(58 509–61 940)
44 746
(43 783–45 556)
47 472
(39 046–52 298)
25 368
(22 115–27 848)
17 983
(16 139–20 842)
Cas asymptomatiques par 100 000Tableau 3 Note de bas de page b habitants 47 638
(44 775–51 455)
113 752
(110 854–117 951)
58 754
(52 099–60 876)
108 293
(107 001–111 504)
90 302
(89 493–91 334)
92 660
(74 662–103 826)
84 869
(81 558–87 347)
81 098
(79 752–83 044)
Hospitalisations par 100 000 habitants 256
(182–387)
4 715
(4 572–4 918)
2 529
(1 541–3 225)
2 246
(2 136–2 348)
1 619
(1 541–1 722)
1 469
(871–2 150)
601
(500–710)
324
(240–438)
Admissions à l'USI par 100 000 habitants 74
(48–111)
1 428
(1 360–1 489)
779
(455–988)
681
(626–724)
498
(452–557)
446
(249–681)
174
(140–212)
93
(66–134)
Décès par 100 000 habitants 48
(32–76)
2 034
(1 938–2 115)
947
(563–1 301)
849
(803–899)
583
(538–634)
350
(182–603)
131
(101–163)
70
(47–92)

Discussion

L'examen et les analyses présentés ici soulignent les conséquences potentiellement catastrophiques de l'éclosion au Canada, si une combinaison de mesures de SP non pharmaceutiques et de vaccination n'avait pas été mise en œuvre pour la contrôler. Les mesures de santé publique, en particulier les mesures qui restreignent les contacts entre les personnes, ont maintenu le contrôle de la transmission du SRAS‑CoV‑2 jusqu'à ce que les niveaux d'immunité de la population, atteints au moyen d'une combinaison de hauts niveaux de couverture vaccinale et d'infections, soient suffisants pour permettre la levée des restrictions. L'efficacité relative de la réponse à la COVID‑19 au Canada est illustrée par le nombre beaucoup moins élevé de décès survenus au Canada que dans d'autres pays semblables. Le succès de la réponse est également illustré par les scénarios contrefactuels modélisés. Même si les mesures de SP non pharmaceutiques et le déploiement de la vaccination ont contribué individuellement à réduire au minimum les conséquences graves, la modélisation contrefactuelle suggère que c'est la combinaison de ces deux composantes qui a limité la morbidité et la mortalité dans la population canadienne. L'incapacité de mettre en œuvre des restrictions au début de la pandémie et la levée trop précoce de ces mesures de SP (avant qu'une proportion suffisante de la population ne soit immunisée au moyen de la vaccination) ont peut‑être entraîné des conséquences catastrophiques en termes de décès et de débordement pour le système de santé.

Limites

Les limites de cette étude comprennent la probabilité d'une sous‑estimation des cas, des hospitalisations et des décès dans les données de surveillance et l'utilisation d'un modèle qui simulait l'éclosion dans une « communauté canadienne moyenne » sans tenir compte des variations régionales de la démographie, des taux de contact et de la sensibilité à l'infection. Toutefois, les résultats du modèle semblent être modérés en projetant environ 4,5 millions de cas pour l'ensemble du Canada dans le scénario de « Observation au niveau de référence » (ce qui suggère, avec 3,3 millions de cas signalés, un taux de déclaration optimiste de 73 %), mais 18 000 décès comparativement aux 38 000 décès observés. Le modèle n'a pas tenu compte des éclosions à taux élevé de transmission et de mortalité de cas élevés dans les établissements de soins de santé et de soins de longue duréeNote de bas de page 28. Par conséquent, les infections, les hospitalisations et les décès ont été sous‑estimés dans les scénarios contrefactuels.

Conclusion

La réanalyse de la pandémie de COVID‑19 et des interventions en santé publique sera habituelle dans les mois et les années à venir. Même si la réponse à la COVID‑19 au Canada a pu être relativement efficace, elle n'était pas parfaite, et d'autres études, y compris des analyses régionales plus poussées pour le Canada, seront nécessaires pour tirer les leçons de cette pandémie. Pour ce faire, il faudra examiner les répercussions plus importantes de la COVID‑19 (particulièrement le syndrome post-COVID), l'éventail des mesures de santé publique et les conséquences imprévues des mesures de santé publique sur la santé.

Déclaration des auteurs

N. H. O. — Conception et rédaction du manuscrit

P. T. — Rédaction du manuscrit

A. F. — Rédaction du manuscrit

J. C. — Rédaction du manuscrit

V. G.‑R. — Rédaction du manuscrit, modélisation

T. T. — Rédaction du manuscrit

V. N. — Modélisation, rédaction du manuscrit

Intérêts concurrents

Aucun.

Remerciements

Nous remercions Aashna Uppal pour son aide avec les figures 1 et 2.

Financement

Ce travail est financé par l'Agence de la santé publique du Canada.

Documents supplémentaires

Ces documents peuvent être consultés dans le dossier Documents supplémentaires.

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